Les dépenses par personne pour les médicaments d'ordonnance sont en baisse au Canada, une première depuis la Seconde Guerre mondiale, révèle un nouveau rapport.

Les Canadiens ont dépensé, en 2012-2013, près de 23 milliards $ pour se procurer des médicaments d'ordonnance en pharmacie, soit 650 $ par personne en moyenne. Il s'agit d'une baisse d'un pour cent par rapport aux données recueillies il y a cinq ans.

Mais les économistes de la santé ayant compilé les données de la plus récente édition du «Canadian Rx Atlas» - un rapport détaillé sur l'usage des médicaments d'ordonnance - croient que ce changement sera de courte durée en raison des modifications à prévoir dans les prix des médicaments.

Les dépenses pour des médicaments dits «de spécialité» - dont ceux qui traitent la polyarthrite rhumatoïde, le VIH et le cancer, entre autres - ont doublé depuis cinq ans, pour atteindre 3 milliards $.

Le rapport précise également que bien que le coût moyen d'un médicament pour réduire l'hypertension artérielle est de 27 $, une prescription pour certains anti-inflammatoires peut atteindre 2100 $.

Selon le principal auteur de l'étude, Steve Morgan, professeur à l'école de santé publique de l'université de la Colombie-Britannique (UBC), il faut se féliciter du fait que les Canadiens dépensent beaucoup moins que ce que les tendances historiques laissaient croire, mais qu'il s'agit, en quelque sorte, d'une accalmie avant la tempête.

Plus du tiers des médicaments mis au point à l'heure actuelle par les entreprises pharmaceutiques sont spécialisés. Les Canadiens devront donc payer le prix fort pour ces médicaments «de niche», qui ne tarderont pas à arriver sur les tablettes des pharmaciens.

Des signes avant-coureurs du nouveau modèle de revenus de l'industrie pharmaceutique ont ainsi été répertoriés dans cette édition du Canadian Rx Atlas, a poursuivi M. Morgan.

«Les élus doivent agir sans plus tarder pour assurer des prix justes et une accessibilité équitable avant que les dépenses n'explosent à nouveau», a-t-il souhaité.

Les dépenses de médicaments prescrits par personne - et sans tenir compte d'une catégorie d'âge en particulier - ont été, en moyenne, beaucoup plus élevées au Québec, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve-et-Labrador que dans le reste du Canada. A contrario, on retrouve la Colombie-Britannique et le Manitoba de l'autre côté du spectre, avec des dépenses nettement en-deçà de la moyenne nationale.

Par ailleurs, les Québécois paient davantage pour leurs médicaments en raison, notamment, des frais d'ordonnance plus élevés des pharmaciens et d'un nombre inférieur de médicaments génériques disponibles.

Le rapport fait également état de différences marquées entre les médicaments consommés par les femmes et les hommes au cours des cinq dernières années au Canada.

Les dépenses par personne pour des antidépresseurs étaient deux fois plus élevées chez les femmes que les hommes, en moyenne. Chez les femmes de 40 à 64 ans, quelque 550 millions $ par année ont été dépensés pour des antidépresseurs, contre 270 millions $ pour les hommes.

La somme déboursée chaque année pour ce type de médicament est par ailleurs passée de 1,3 à 1,4 milliard $ de 2007-2008 à 2012-2013. L'accroissement et le vieillissement de la population n'ont toutefois pas influencé cette hausse, selon les auteurs.

«Les études aux États-Unis démontrent que beaucoup de personnes qui se font prescrire des antidépresseurs n'ont pas de diagnostic psychiatrique, et c'est la raison pour laquelle les antidépresseurs sont aussi répandus», a indiqué une professeure adjointe au département de pharmacologie et de thérapeutique de la UBC, Barbara Mintzes.

La forte consommation de ce médicament au Canada pourrait s'expliquer de la même façon, a-t-elle ajouté.

Quant aux enfants et aux adolescents, le document souligne des dépenses élevées pour des médicaments contre le trouble d'hyperactivité avec déficit de l'attention (THADA) et l'asthme pour les garçons. Les chercheurs croient qu'il faudra davantage de recherches afin de déterminer si des facteurs sociaux et la prescription excessive sont en cause.