Une poursuite de 14 millions de dollars d'un médecin contre le Centre universitaire de santé McGill (CUSM), son ancien employeur, met en lumière les enjeux financiers énormes en matière de procréation assistée.

Le poursuivant, le Dr Seang Lin Tan, a fondé le Centre de reproduction de Montréal en 1996 dans les murs de l'hôpital Royal Victoria, deux ans après avoir été nommé à la tête du service d'obstétrique et de gynécologie du CUSM.

De hausse salariale en hausse salariale, le CUSM en est arrivé à verser au Dr Tan une rémunération annuelle de 1,67 million en 2005.

Entente non écrite

Dans la poursuite, le Dr Tan allègue qu'il avait au surplus obtenu du CUSM une entente non écrite de partage des profits en vertu de laquelle il n'a cependant touché que 250 000$ en 2009, soit bien moins que ce qu'il estime être son dû.

Dans les documents de sa défense, le CUSM nie fermement s'être entendu avec le Dr Tan sur un quelconque partage des profits. Le CUSM admet cependant avoir versé une somme de 250 000$, une somme, assure l'établissement, qui n'avait cependant rien à voir avec un partage des profits.

Ces 250 000$, comprend-on, étaient destinés à la création d'une clinique privée par le Dr Tan. Dans la défense, le CUSM explique que cet argent devait permettre au Dr Tan d'entreprendre les démarches nécessaires pour «répondre à l'augmentation anticipée de la capacité de traitement» consécutive à la décision du gouvernement de rembourser des traitements de procréation assistée.

Les 14 millions réclamés par le Dr Tan comprennent essentiellement les sommes liées à la présumée entente de partage de profits, de même que 50 000$ de compensation pour son congédiement, qui ne s'est pas fait dans les règles de l'art, à son avis.

Le Dr Tan admet cependant avoir en sa possession deux machines médicales valant 271 250$ et appartenant au CUSM, instruments qu'il conserve en guise d'acompte, en quelque sorte.

Comment d'aussi grosses rémunérations et d'aussi grosses sommes peuvent-elles avoir été en jeu?

Notons qu'avant le remboursement par la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) des traitements de fécondation in vitro, les patients payaient jusqu'à 7000$ par cycle.

Comme on peut le lire dans la poursuite, le Dr Tan est aujourd'hui président d'une société à numéro et de deux cliniques privées de procréation assistée à Montréal.

La poursuite a été déposée il y a un an et elle est passée sous le radar jusqu'à ce que The Gazette en fasse état hier.

Le CUSM et le Dr Tan n'ont pas répondu à nos questions hier. Le CUSM a cependant envoyé un bref courriel en fin de journée dans lequel il «conteste vigoureusement la procédure judiciaire et chacune des allégations engagées devant la Cour par le Dr Tan».