Qu'elles résultent d'une blessure, d'une mauvaise circulation ou d'une chirurgie, les plaies difficiles - celles qui ne guérissent pas - constituent un lourd fardeau pour le système de santé. C'est un problème coûteux et fréquent, mais peu documenté, a constaté l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS) qui vient de produire un rapport sur la question.

Le tiers des patients en soins prolongés

Près de 30% des patients hospitalisés pour des soins prolongés développent des plaies difficiles. Il peut s'agir de plaie de lit, d'une plaie chirurgicale qui ne guérit pas, de gangrène ou d'un ulcère à la jambe. Aucun milieu n'est toutefois épargné. Ainsi, 10% des patients dans les centres de soins de longue durée (CHSLD), 7% des patients qui reçoivent des soins à domicile et 4% des patients hospitalisés en soins de courte durée à l'hôpital présentent aussi ce qu'on appelle des plaies «difficiles».

Risque plus élevé chez les diabétiques

Les diabétiques hospitalisés dans les hôpitaux courent six fois plus de risques que les autres patients de développer des plaies qui guérissent mal ou qui ne guérissent pas, indique l'étude. Pourtant, beaucoup seraient évitables si une meilleure attention était portée aux lésions aux pieds des diabétiques. Le diabète est généralement associé à une mauvaise circulation sanguine et une perte de sensation aux extrémités. Une personne diabétique peut avoir une lésion mineure au pied sans le savoir, parce qu'elle ne le sent pas, et cette lésion peut s'aggraver jusqu'à devenir une plaie difficile.

En 2011-2012, environ 200 amputations ont dû être réalisées au Canada en raison du diabète.

Un problème sous-évalué

Les plaies difficiles chez les patients hospitalisés en soins de courte durée sont probablement sous-évaluées, estiment les auteurs de l'étude. «Quand on parle de plaies de lit, il y a différents stades. Au niveau des premiers stades, on pense qu'il y a une sous-déclaration», explique Claude Lemay, porte-parole de l'ICIS. Malgré les programmes de surveillance, une petite rougeur n'est pas toujours détectée comme une plaie de lit. Selon l'état de santé d'un patient, la plaie de lit ne constitue pas toujours la priorité dans son traitement, si bien qu'elle continue de prendre de l'ampleur.

Quelque 117 000 patients en soins de courte durée étaient atteints de plaies difficiles en 2011-2012.

Prévalence accrue chez les 65-74 ans

L'âge est un facteur de risque en ce qui concerne les plaies chroniques, soit celles qui durent plus de trois mois et qui ne guérissent pas. L'étude de l'ICIS montre que les personnes de 65 à 74 ans sont les plus touchées. Il ne semble pas y avoir une prévalence plus grande chez les gens âgés de plus de 75 ans. Les auteurs de l'étude croient que c'est parce qu'une personne diabétique ou atteinte d'une maladie chronique, donc plus à risque de développer des plaies difficiles, meurt généralement à un âge moins avancé, ce qui peut expliquer la raison pour laquelle la prévalence semble moins élevée chez les personnes plus âgées.

Conséquences importantes

Banales, les plaies? Elles coûtent pourtant très cher au réseau de la santé. «Les coûts sont importants. Quand on parle de coûts directs, on pense aux médicaments, aux pansements, aux traitements. Quant aux coûts indirects, il s'agit d'un prolongement de la durée des séjours à l'hôpital», note Claude Lemay, porte-parole de l'ICIS. Les conséquences sur la santé et la qualité de vie des patients sont aussi importantes: douleur, anxiété, perte de mobilité, isolement social, amputations et dans les pires cas, décès.

1 000 000$

Coût annuel estimé des plaies de lit et des infections de plaies chirurgicales dans chaque hôpital canadien.

Méthodologie

L'étude a été menée avec des données recueillies dans l'ensemble des hôpitaux canadiens, mais dans certains cas, les hôpitaux du Québec ont été exclus pour des considérations méthodologiques. Les personnes diabétiques hospitalisées au Québec reçoivent systématiquement un «code» parce que le diabète est considéré comme «une condition importante associée», ce qui n'est pas le cas ailleurs. Les données concernant les soins de santé de longue durée ont été majoritairement recueillies en Ontario.