Les nouveaux pouvoirs octroyés aux pharmaciens vont coûter quelque 100 millions de dollars par année à l'ensemble des contribuables.

L'évaluation provient de l'ex-ministre de la Santé, Yves Bolduc, le père de la loi 41, qui donne aux pharmaciens le pouvoir de prescrire et ajuster certains médicaments à compter du 3 septembre.

Jusqu'à maintenant, ni son successeur, l'actuel ministre de la Santé Réjean Hébert, ni l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP) n'avaient voulu se risquer à donner un chiffre évaluant l'impact financier de la mesure sur les finances publiques.

En point de presse mercredi, M. Bolduc a lâché le morceau, en faisant valoir qu'au bout du compte le Québec ferait tout de même des économies, grâce à une baisse présumée d'affluence dans les cabinets de médecin, les cliniques médicales et les salles d'urgence. C'était précisément là le but de la loi 41.

Pendant ce temps, les négociations entre Québec et les pharmaciens se poursuivent en vue de déterminer précisément pour quels services les pharmaciens pourront facturer des honoraires et quel montant Québec est prêt à rembourser. Les pharmaciens vont exiger des honoraires allant de 12,50 $ à 30 $ pour chaque consultation.

M. Bolduc s'est dit préoccupé par le choix du ministre de la Santé de préconiser ce qu'il appelle un «système à trois vitesses», qui fera en sorte qu'on se retrouvera avec trois catégories de patients: ceux dont le service en pharmacie sera assuré par l'État, ceux qui seront pris en charge par leur assurance privée et ceux qui devront payer la consultation de leur poche, si leur assureur refuse la facture.

Il aurait souhaité que les services offerts par les pharmaciens relèvent du régime d'assurance-maladie plutôt que de celui d'assurance-médicaments, afin d'assurer une couverture universelle et gratuite.

«On s'en va vers un système à trois vitesses», selon le député de Jean-Talon, qui juge que le ministre Hébert «ne sait pas trop où il s'en va» dans ce dossier comme dans d'autres.

La loi 41 avait été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en 2011. À l'époque, M. Bolduc avait prévu s'entendre avec les pharmaciens avant décembre 2012, en fonction du régime d'assurance-maladie.

«En rendant ça optionnel (le service de consultation en pharmacie), on n'est pas certain que certaines compagnies d'assurance vont le couvrir», a-t-il déploré.

Au total, seulement 40% des Québécois auront accès aux consultations gratuites en pharmacie, parce qu'ils n'ont pas d'assurance privée. Pour les autres 60%, il est impossible de dire à l'heure actuelle qui, du patient ou de l'assureur, va payer la note.

On assiste selon M. Bolduc à une réelle privatisation des soins de santé, qualifiant de «taxe pharmacie» la somme que le patient devra débourser pour obtenir sa consultation auprès du pharmacien.

À compter de septembre, les pharmaciens seront autorisés à prescrire des médicaments pour régler certains problèmes de santé mineurs comme les feux sauvages, les allergies saisonnières, les infections urinaires, par exemple, ou à renouveler une prescription d'anovulants. Ils ne pourront en aucun cas poser un diagnostic.