Conséquence des compressions budgétaires et d'un taux élevé d'infections nosocomiales, des préposés aux bénéficiaires de l'hôpital Royal Victoria et de l'hôpital général de Montréal devront désormais accomplir des tâches d'entretien ménager, délaissant certains soins aux patients, a appris La Presse.

La direction du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) teste présentement dans cinq unités une nouvelle « routine » de nettoyage des objets fréquemment touchés comme les télécommandes et les poignées de porte.

La Presse a obtenu un échange récent de courriels entre des gestionnaires du Centre Universitaire de santé McGill (CUSM) et des représentants syndicaux de l'hôpital dans lequel une directrice évalue qu'un préposé qui s'occupe d'environ 8 à 9 patients par jour devra dédier environ une heure de chaque quart de travail à accomplir ses nouvelles tâches.

« Les taux d'infection à la bactérie C. Difficile et à la bactérie Entérocoque résistant à la vancomycine sont actuellement très élevés », écrit la directrice associée des soins infirmiers, Alyson Turner, dans l'un des courriels. « Nous réalisons que si nous voulons en faire une priorité, cela pourrait dire que certaines tâches des préposés aux bénéficiaires pourraient devoir être abandonnées. Malheureusement, cela pourrait dire qu'un moins grand nombre de patients pourra avoir accès au programme de marche par exemple », poursuit-elle.

Faire marcher les patients est une mesure grandement mise de l'avant dans les établissements de santé depuis quelques années pour diminuer la durée des hospitalisations et favoriser le rétablissement. Il est prouvé que cette mesure est parmi les plus efficaces pour éviter que les personnes âgées se déconditionnent lors d'un séjour à l'hôpital.

Les taux d'infections nosocomiales sont présentement de 35 par 10 000 jours/patients à l'hôpital général de Montréal et de 22 par 10 000 jours/patients à l'hôpital Royal-Victoria. L'institut national de santé publique du Québec rapporte qu'en 2011-2012, la moyenne québécoise était de 7,32 par 10 000 jours/patients.

Les taux ont commencé à bondir depuis janvier. Cela coïncide avec le démantèlement d'une escouade d'entretien ménager de 12 employés spécifiquement dédié au nettoyage contre la C difficile. Le CUSM s'est toujours défendu en affirmant qu'il s'agissait en fait d'un projet pilote et que ce n'était pas la conséquence des compressions budgétaires imposées à l'établissement.

En janvier, le ministère de la Santé a demandé à l'établissement de faire des coupures de 50 millions de dollars pour éviter d'enregistrer un déficit de 155 millions en 2012-2103, qui aurait été le pire déficit d'un hôpital dans l'histoire du Québec. Le ministère a toutefois donné comme directive que les soins aux patients n'en soient pas affectés.

Mesure dénoncée

« C'est inacceptable de couper dans les soins et services aux patients. Nous sommes tout à fait contre cette mesure», a dénoncé le président du syndicat des employés du CUSM, Paul Thomas.

« Les préposés sont déjà surchargés. Par ailleurs, quelle est la logique de payer des préposés aux bénéficiaires au lieu de préposés à l'entretient ménager, alors qu'ils gagnent entre 1 et 3$ de plus par heure. »

La directrice des ressources humaines du CUSM Johanne Brodeur a précisé que l'entretien ménager et des instruments se trouvent déjà dans la description de tâches des préposés aux bénéficiaires de l'hôpital, mais que plusieurs d'entre eux l'ignoraient puisqu'ils n'avaient jamais été appelés à accomplir de telles tâches.

La porte-parole du CUSM Isabelle Malboeuf a par ailleurs ajouté que les taux d'infections nosocomiales sont plus élevés au CUSM car ils ont des tests de détection plus sophistiqués.

Elle affirme que l'escouade de nettoyage a été remplacée par un programme de formation sur la prévention des infections disponible en continu pour les équipes médicales et un investissement de 50 000 dollars pour l'utilisation de lingettes au Chloroxidine.