Des pharmaciens membres du Groupe Uniprix sont liés à McKesson, un géant de la distribution de médicaments, par un «programme de conformité» qui prévoit le versement de rabais substantiels en fonction de leurs achats.

Pour y avoir droit, ils doivent réaliser plus de 90% de leurs commandes de médicaments génériques conformément à une «liste préférentielle» de produits et de fabricants fournie par le distributeur. Des cibles sont aussi identifiées pour les médicaments innovateurs.

Un formulaire d'adhésion élaboré par Groupe Uniprix de concert avec McKesson, que La Presse a obtenu, précise que les «pharmaciens conformes» peuvent recevoir «un montant représentant jusqu'à 35% du prix d'achat des produits de marque privée» acquis auprès de McKesson dans la période considérée.

Une réduction substantielle du coût de la cotisation annuelle versée par le pharmacien au Groupe Uniprix est également prévue.

La Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) enquête depuis plusieurs années sur un programme similaire, lancé en 2009, liant McKesson à plusieurs dizaines de pharmaciens de la bannière Proxim.

Les enquêteurs cherchent notamment à déterminer si le versement prévu d'un «rabais volume» contrevient aux dispositions de la Loi sur l'assurance-médicaments et affecte indûment le coût des produits remboursés par le régime public.

Le règlement gouvernemental régissant les conditions de reconnaissance d'un grossiste en médicaments précise que l'entreprise ne peut accorder «aucune réduction du prix d'un médicament reliée à l'atteinte d'un volume déterminé d'achat» ou reporter une telle réduction sur «d'autres marchandises».

L'enquête suit son cours

McKesson, l'un des plus importants distributeurs au Canada, a enregistré par anticipation une dépense de 40 millions en lien avec cette affaire. La somme reflète la «perte probable» découlant de «réclamations juridiques potentielles». La RAMQ se borne à dire de son côté que l'enquête «suit son cours» et refuse d'en commenter les détails.

Le Groupe Uniprix affirme que le programme de conformité lancé avec McKesson n'a soulevé, contrairement à celui de Proxim, aucune question de la part de la RAMQ. Ses dirigeants se disent convaincus qu'il «respecte les lois et règlements et leur esprit».

Uniprix avait refusé il y a quelques semaines, avant l'obtention du formulaire d'adhésion, de confirmer la nature des «avantages» conférés aux pharmaciens participants en évoquant le caractère confidentiel de ses ententes commerciales.

L'Ordre des pharmaciens a indiqué en mars que le syndic cherche à déterminer si certains de ses membres ont pu commettre une faute déontologique en adhérant à un programme de conformité.

La porte-parole de McKesson Canada, Élizabeth Huart, a indiqué hier que Proxim et Uniprix étaient les seules bannières avec lesquelles un programme de ce type avait été élaboré. Elle assure que ses dispositions sont légales. Mme Huart note qu'Uniprix ne fait pas «à sa connaissance» l'objet d'une enquête de la RAMQ.

Plusieurs centaines de pharmaciens ont été sanctionnés au cours des dernières années pour leur participation à un système de ristournes qui avait cours au début des années 2000.

Ces ristournes étaient versées sous diverses formes par plusieurs fabricants de médicaments génériques qui cherchaient ainsi à favoriser leurs produits. La loi a été modifiée sensiblement par la suite pour éviter ce type d'abus.