Les stéroïdes ont tué son fils. Donald Hooton en est convaincu. Il y a presque 10 ans, ce père de famille texan a trouvé son fils Taylor, 16 ans, pendu dans sa maison, dans une banlieue cossue de Dallas. Pour M. Hooton, ce jour marque aussi le début d'une croisade acharnée contre l'usage des stéroïdes.

Rien ne destinait ce père de trois enfants à devenir l'épine au pied des consommateurs de stéroïdes.

La seule chose qui sortait un peu de l'ordinaire, chez les Hooton, était leur passion dévorante pour le baseball, inscrite dans l'ADN familial.

Un cousin de la famille avait joué dans les ligues majeures. Le fils aîné de M. Hooton s'est rapproché de lui, puis Taylor a voulu suivre cette voie. «Il voulait faire comme son cousin et son frère», raconte M. Hooton.

Le jeune lanceur, un gaillard de 1,90 m, fréquentait l'école secondaire de Plano et s'entraînait comme une machine. Sa vie tournait autour du sport. Jusqu'au jour où on l'a trouvé mort.

Chez les Hooton, le choc fut brutal. Non seulement il a fallu encaisser le suicide de Taylor, mais aussi apprendre qu'il consommait des stéroïdes depuis environ six mois.

«On a été soufflés de voir combien de jeunes en prenaient dans notre entourage. Après la mort de Taylor, la moitié des jeunes de l'équipe ont avoué que c'était leur cas.»

Pourtant, les responsables de l'équipe et de l'école ont présenté Taylor comme un malheureux cas isolé. Un déni frustrant pour Donald Hooton, qui a dès lors décidé d'ouvrir les yeux de l'Amérique sur ce grand tabou.

M. Hooton suit l'enquête sur la mort de son propre fils pour comprendre les rouages de cette consommation. Les vendeurs de stéroïdes, souvent d'anciens athlètes de l'école, les laboratoires aménagés dans des garages, des sous-sols ou autres endroits clandestins...

Des signes visibles

Il n'a rien vu à l'époque, mais Donald Hooton connaît aujourd'hui très bien les symptômes de la consommation de stéroïdes. «Tous les signes étaient visibles. Taylor avait pris 30 livres en 90 jours. Un médecin nous a dit plus tard qu'aucun ado ne peut prendre autant de poids en mangeant du steak et des haricots verts. Mais nous, nous le complimentions...»

Psychologiquement, Taylor avait aussi changé. L'enfant joyeux et dynamique était devenu agressif et taciturne. «Au moindre reproche, il pouvait exploser et trouer le mur avec ses poings.»

Les Hooton, inquiets, ont décidé d'emmener Taylor chez le médecin. Ce dernier n'a rien vu et n'a pas jugé nécessaire de faire un test d'urine, se contentant de demander au garçon s'il prenait de la drogue.

Il s'est pendu quelques semaines plus tard.

M. Hooton n'a pas de preuve scientifique, mais il est convaincu que le suicide de son fils est lié aux stéroïdes. Il est certain que notre profonde méconnaissance du sujet a joué un rôle. «On a créé une fondation au nom de mon fils en 2004 et, aujourd'hui encore, il n'existe aucun protocole médical pour savoir quoi faire», déplore M. Hooton.

Il croit qu'il est temps de former des professionnels à cette réalité de plus en plus répandue. «Qui surveille nos jeunes, actuellement? La réponse: personne», tranche-t-il.

La fondation fait ce travail de sensibilisation auprès de la communauté médicale, des entraîneurs et des parents. M. Hooton a obtenu de prestigieux appuis, notamment du directeur général des Yankees de New York et de l'ancien frappeur étoile des Cardinals de Saint-Louis Mark McGwire, qui a avoué avoir consommé des stéroïdes.

Un soutien important, surtout à une époque où les stéroïdes ne sont plus seulement utilisés pour le sport, mais pour le simple culte du corps parfait.