Signe que le sida coûte cher partout, les frais de traitement du VIH/Sida chez les détenus canadiens ont plus que triplé en six ans, révèlent des données obtenues par La Presse grâce à la Loi sur l'accès à l'information. Selon les experts, il s'agit d'une preuve tangible que les patients sont de mieux en mieux soignés entre les murs.

En 2011-2012, les médicaments et autres services médicaux liés au virus de l'immunodéficience humaine et au sida ont coûté presque 7 millions de dollars dans les pénitenciers fédéraux pour un peu plus de 300 personnes. À titre indicatif, les coûts n'étaient que de 2 millions de dollars en 2005-2006, soit trois fois moins, pour à peine quelques dizaines de malades de moins. La facture totale des six dernières années atteint les 35 millions, trithérapie et suivi médical compris.

«Les détenus atteints du VIH sont beaucoup mieux encadrés qu'avant», observe Laurence Mersilian, directrice du Centre associatif polyvalent d'aide hépatite C (CAPAHC), un organisme qui offre du soutien aux personnes atteintes de l'hépatite C ou du VIH. «Les services qu'on leur accorde sont meilleurs. Ils ont vraiment accès aux traitements et reçoivent d'excellents soins.» La chose est aussi vraie pour l'hépatite C, dit-elle.

Selon le président de l'Office des droits des détenus, Jean-Claude Bernheim, le changement s'est amorcé il y a une dizaine d'années, au moment où les traitements reçus en prison n'avaient rien à voir avec ceux offerts dans la société. «Aujourd'hui, c'est similaire», dit-il.

C'est un gain important, compte tenu du fait que le VIH fait beaucoup de victimes dans les prisons. Actuellement, un peu moins de 3% de la population carcérale fédérale est séropositive; 30% souffre d'hépatite C. C'est de 7 à 10 fois plus que dans la population normale pour le sida et 40 fois plus pour l'hépatite.

«C'est donc particulièrement important de les soigner pendant qu'ils sont détenus, estime Mme Mersilian, parce qu'ils vont finir par sortir et risquent alors d'infecter d'autres gens s'ils n'ont pas un bon suivi médical. Mieux vaut les traiter en prison, où on peut les surveiller.»

Jean-Claude Bernheim est du même avis. «Le fait de ne pas traiter un groupe de la population, quel qu'il soit, constituerait un problème de sécurité publique. On maintiendrait un risque d'épidémie.»

Afin de contrer le VIH dans les pénitenciers, les détenus ont la possibilité de passer des tests de dépistage des maladies infectieuses tout au long de leur peine lorsqu'ils en font la demande ou lorsqu'un professionnel de la santé le recommande, explique une porte-parole de Service correctionnel Canada. «Les détenus qui sont déjà au courant qu'ils sont atteint du VIH au moment de leur admission et ceux à qui l'on diagnostique une infection par le VIH au SCC sont référés à des experts dans le domaine des maladies infectieuses.»