Une Québécoise originaire de la ville de Québec, Françoise Girard, vient de prendre la relève d'Adrienne Germain à la présidence de la prestigieuse Coalition internationale pour la santé des femmes (IWHC). Cette coalition est reconnue mondialement pour sa collaboration avec les Nations unies et son influence sur les politiques en santé touchant les femmes dans les pays en développement, comme dans ceux de l'Afrique, de l'Asie et de l'Amérique latine.

Mme Girard est reconnue pour son rôle de défenseur de la santé et des droits de la personne sur la scène internationale. Elle a notamment été directrice d'un programme de l'Open Society Foundation (OSP), ou elle gérait un budget de 40 millions. Elle a aussi joué un rôle important en santé et dans la lutte contre le sida en Afrique, en Europe de l'Est et en Haïti. Elle assume la présidence de l'organisation dans une période charnière des politiques sur la santé des femmes et des filles, en 2014, le 20e anniversaire de la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD), qui s'était tenue au Caire pour la première fois, en 1994.

À cette époque, la contraception était surtout vue comme un moyen efficace de maîtriser la démographie, et il est temps de faire le point, a expliqué Mme Girard, jointe à New York dans ses nouveaux bureaux, où elle s'affaire à rencontrer sa nouvelle équipe de travail.

«En 1994, on a mis l'accent sur la femme et sur la contraception, mais c'était avant tout pour contrôler le niveau de population. On ne parlait pas aux femmes pour leur donner le choix. Par la suite, on a mis l'accent sur la femme, sur ses besoins. Aujourd'hui, il ne viendrait à l'idée de personne d'imposer le stérilet ou un nombre d'enfants à une femme. Maintenant, il faut prendre le pouls de la situation, se demander, par exemple, comment on peut libéraliser l'avortement sans risques pour la santé de la femme.»

Oeil critique vers Ottawa

La nouvelle présidente de la Coalition pose un oeil critique sur les pays développés qui décident de mettre les priorités ailleurs que dans la santé. «C'est plus facile de mettre de l'argent dans l'armée ou dans les transports. C'est trop facile de dire que l'avortement est un sujet trop controversé et qu'on préfère ne pas s'en occuper», dit-elle.

Mme Girard déplore ainsi la tentative d'un député conservateur, à Ottawa, au début de février, d'amorcer une réouverture du débat sur l'avortement. «Ce n'est pas utile du tout. Quand un pays comme le Canada ou les États-Unis tentent de ramener la question avec des opposants à l'avortement de l'extrême droite, nos partenaires dans les pays en voie de développement se demandent pourquoi eux devraient s'ouvrir à la question. Il faut enlever les obstacles à l'avortement et faire valoir les droits des femmes. Ce qu'il faut, ajoute-t-elle, c'est une solidarité internationale.»

Outre l'accès à l'avortement, Mme Girard entend se concentrer sur les jeunes femmes et les adolescentes. Elle estime qu'il faut les joindre pour leur parler de la violence sexuelle, de la contraception et des infections transmises sexuellement.

«Certains estiment qu'on va dévergonder les filles en leur parlant de sexualité. Les garder dans l'ignorance ne les empêchera pas d'avoir une vie sexuelle. Il faut des services d'accompagnement, il y a un manque à ce niveau. Bref, ce n'est pas tout de distribuer des condoms, encore faut-il pouvoir les utiliser, et savoir comment éviter de se retrouver dans des scénarios de violences ou d'agressions sexuelles.»