Le directeur médical du Centre de chirurgie privé Rockland MD tire à boulets rouges sur la loi garantissant l'accès à des opérations au Québec. Selon le Dr Fernand Taras, sa clinique fait les frais d'une loi adoptée sous l'ancien ministre de la Santé Philippe Couillard et qui n'a pas été achevée correctement sous l'actuel ministre, Yves Bolduc.

Au lendemain du dévoilement des conclusions de l'enquête de la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) selon lesquelles le Centre de chirurgie Rockland aurait vendu illégalement des forfaits santé allant jusqu'à 17 000$ à des patients en attente d'une chirurgie dans le secteur public qui y auraient été dirigés en vertu de la loi, l'actionnaire principal du centre a sollicité une entrevue avec La Presse pour remettre les pendules à l'heure. Le Dr Taras a l'intention de contester les conclusions de la RAMQ devant les tribunaux. Il demande également aux fédérations représentant les omnipraticiens et les spécialistes de retourner à la table afin de mieux rémunérer les cliniques privées qui sont subventionnées en vertu de la loi.

«Actuellement, nos chirurgiens reçoivent de la RAMQ des honoraires pour l'acte médical, mais il n'y a rien de prévu dans la loi pour payer le personnel en soins, l'équipement et nos infrastructures. À titre d'exemple, des agrafes pour une opération bariatrique coûtent à elles seules entre 9000 et 12 000$ et ce n'est pas remboursé en vertu de la loi. Nous, ce qu'on dit, c'est que notre pratique administrative est légale.

Et à l'heure actuelle, c'est bien dommage, mais nous devons facturer les patients pour ce qui est non assuré par la RAMQ.»

Le départ de David Levine

Le Dr Taras craint que les conclusions de la RAMQ ne servent d'arguments au gouvernement pour ne par renouveler le partenariat avec l'hôpital du Sacré-Coeur visant à offrir certaines interventions électives. Il trouve d'ailleurs curieux que le président-directeur général de l'agence de la santé de Montréal, David Levine, ait annoncé son départ quelques jours à peine après la sortie du ministre Bolduc contre les chirurgiens qui se garderaient de longues listes d'attente pour diriger leurs patients vers leur clinique privée.

«La décision de renouveler le partenariat avec Sacré-Coeur doit obtenir l'aval de l'agence, souligne le Dr Taras. C'est curieux, ce départ. C'est d'autant plus curieux que la RAMQ nous avait informés, avant les Fêtes, que son enquête était terminée. On s'interroge sur une possible démarche politique pour discréditer notre clinique.»

Recommandations

Selon le ministre Bolduc, certains chirurgiens - particulièrement à Montréal et à Laval - recommandent directement leurs patients au privé au lieu de leur offrir une deuxième offre, tel que prévu dans la loi 33. Cette loi, adoptée en 2007, prévoit qu'un chirurgien a l'obligation de recommander un patient à l'un de ses confrères ou à un autre établissement de santé public quand il est dans l'impossibilité de l'opérer à l'intérieur de six mois.

En 2010-2011, plus de 2600 opérations ont été réalisées au Centre de chirurgie Rockland, en partenariat avec l'hôpital du Sacré-Coeur. Ce nombre a atteint 3000 interventions d'un jour en 2012. Dans ce cas, le seul du genre au Québec, l'hôpital paie des frais de location au Centre Rockland. La situation du Centre est donc différente de celle des cliniques qui opèrent en vertu de la loi garantissant l'accès, et auxquelles la RAMQ verse des paiements à l'acte.