Des Québécois devenus de véritables joueurs pathologiques après avoir pris un médicament contre les symptômes de la maladie de Parkinson et le syndrome des jambes sans repos ont obtenu victoire devant le tribunal. À la suite d'un recours collectif, le fabricant du médicament Mirapex a accepté de verser 2 717 600$ dans un fonds destiné à des centaines de patients qui, dans plusieurs cas, ont tout perdu au jeu.

France Lépine, à l'origine du recours collectif, n'avait jamais joué au casino ni acheté des billets de loterie avant de se faire prescrire le fameux médicament, en 2007, pour le syndrome des jambes sans repos. Le Mirapex a soulagé ses crampes et les spasmes qui l'empêchaient souvent de dormir, mais sa vie est devenue un vrai désastre. Elle a joué chaque jour au point de dilapider tous ses biens en quatre mois et de devoir déclarer faillite. Elle espère obtenir 60 000$ du fabricant Boehringer Ingelheim (Canada).

L'avocat qui a piloté le recours collectif devant la Cour supérieure, Me André Lespérance, estime qu'environ 200 personnes peuvent obtenir une compensation. Elles ont jusqu'au 17 février pour présenter leur réclamation, preuves à l'appui. Selon lui, la moitié de ces personnes sont devenues dépendantes au jeu à cause de ce médicament. Les autres se sont mises à avoir d'autres comportements tout aussi dévastateurs: achat compulsif, boulimie, augmentation de la libido, voire hypersexualité.

Même si la société pharmaceutique a consenti à dédommager les patients, elle nie avoir fait preuve de négligence dans la conception, la fabrication, la commercialisation, la distribution et la vente du médicament en omettant de faire les mises en garde nécessaires quant à ses effets secondaires. Depuis que la poursuite a été intentée, Boehringer a modifié la monographie de son produit pour y mentionner les effets secondaires possibles sur le comportement. Elle a aussi dû verser des millions à des patients états-uniens qui ont souffert des mêmes effets secondaires.

La substance noire

Au Québec, les neurologues ont prescrit le Mirapex de 2000 à 2005 sans savoir qu'il pouvait induire des troubles compulsifs graves. Même les psychiatres affirmaient qu'il ne pouvait pas y avoir de base biologique au jeu pathologique. Depuis, des études sur les effets secondaires du Mirapex ont graduellement fait leur apparition. Même si le médicament est toujours en vente au Canada, le chef du service de neurologie du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM), le

Dr Michel Panisset, explique qu'il ne le prescrit plus.

«De toute façon, ce n'est pas le plus efficace pour les symptômes de la maladie de Parkinson, dit-il. Personnellement, j'aime mieux utiliser un médicament qui existe depuis 50 ans et qui est reconnu. En ce qui concerne le syndrome des jambes sans repos, le Mirapex est très efficace, mais je ne suis pas convaincu des effets à long terme.»

Le Dr Alain Dagher, neurologue à l'Institut de neurologie de Montréal, explique pour sa part qu'il prescrit encore le médicament dans certains cas, mais qu'il avise ses patients des risques. «Les patients ne perdent pas tout au jeu en une journée. La pathologie est graduelle. Ce que je dis à mes patients et à leurs proches, c'est de nous appeler au moindre signe, et qu'on arrêtera le médicament immédiatement.»

Le Mirapex, qui stimule la production de dopamine dans une région du cerveau qu'on appelle substance noire, n'est pas le seul à faire l'objet d'un recours collectif. Un règlement est intervenu dans le cas du Permax, qui cause dans certains cas les mêmes effets secondaires. Un autre médicament, le Requip, fait aussi l'objet d'un recours devant le tribunal. Ils sont de la même famille et sont employés pour réduire les symptômes de la maladie de Parkinson, surtout les tremblements.

Le Neurontin de Pfizer

Un autre avis d'autorisation

d'un recours collectif a été diffusé cette semaine, cette fois pour le médicament Neurontin. Le recours pancanadien soutient que le médicament, un anticonvulsif du géant Pfizer, augmente la propension au suicide. Ce recours collectif s'applique aux gens à qui on a prescrit du Neurontin et qui en ont pris avant

le 5 août 2004.