Depuis un an, le ministère de la Santé a annoncé en grande pompe l'ouverture d'une dizaine de nouveaux groupes de médecine de famille (GMF) dans différentes régions du Québec, promettant une meilleure accessibilité aux médecins de famille. Or, des 10 derniers GMF à avoir été annoncés, aucun n'accepte de nouveaux patients, a constaté La Presse. Et alors que les GMF doivent avoir des heures d'ouverture étendues et un accès à des consultations sans rendez-vous, plusieurs n'offrent toujours pas ces services. Une situation «aberrante», selon le président du Regroupement provincial des comités des usagers, Pierre Blain.

Lundi, Québec a annoncé la création du GMF L'Autre maison, de Longueuil, le 236e au Québec. Mais en communiquant avec cet établissement, on constate qu'aucun nouveau patient ne peut y obtenir le suivi d'un médecin de famille.

Le même phénomène se produit quand on appelle dans les neuf autres GMF lancés depuis le début de l'année par Québec; tous refusent de prendre en charge de nouveaux patients. Certains acceptent seulement de faire des suivis de grossesse.

Lors du lancement du GMF de Pointe-aux-Trembles, en octobre dernier, le ministre de la Santé, Yves Bolduc, a pourtant déclaré que la formation de GMF était le signe que le gouvernement poursuivait son «engagement d'offrir un accès rehaussé aux services de santé».

«Mais tous ces GMF n'acceptent jamais de nouveaux patients. C'est aberrant, déplore Pierre Blain. On ne crée jamais de nouvelles places. Ce n'est pas en ouvrant des GMF qu'on va offrir plus de services à la population.»

Le porte-parole de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), Jean-Pierre Dion, confirme que l'ouverture de GMF «ne crée pas de nouveaux docteurs» et que, dans les premiers temps, aucun nouveau patient n'est généralement accepté. Mais M. Dion explique que les GMF reçoivent des subventions pour recruter une ou deux infirmières et pour informatiser leurs cliniques, ce qui leur permet de devenir plus efficaces. «C'est sûr que ce n'est pas une solution miracle, qui permet du jour au lendemain d'accepter de nouveaux patients, dit-il. Mais à moyen terme, plus de patients peuvent être pris en charge.»

Plus d'heures

M. Dion ajoute que les GMF doivent aussi offrir des heures d'ouverture étendues, notamment en voyant des patients le soir et les fins de semaine. Des heures de consultation sans rendez-vous doivent aussi être offertes. «Même les gens qui ne sont pas suivis au GMF peuvent en profiter», note M. Dion.

Or, La Presse a aussi pu constater que plusieurs GMF n'offrent pas d'heures d'ouverture étendues ou de consultations sans rendez-vous. Par exemple, le GMF L'Autre maison est ouvert uniquement du lundi au vendredi de 8h30 à 17h. Aucun service n'est offert le week-end. Au GMF d'Ormstown, en Montérégie, on n'accepte aucun patient sans rendez-vous. À Québec, il faut être déjà suivi par un médecin du GMF Laval-Québec pour avoir accès aux consultations sans rendez-vous. Impossible, donc, pour un patient orphelin d'y recevoir des services.

Au cabinet du ministre Bolduc, on assure que les GMF améliorent l'accessibilité, mais «pour les gens qui sont déjà patients du GMF». «Si un médecin doit s'absenter, ses patients sont pris en charge par les autres médecins du GMF», explique l'attachée de presse de M. Bolduc, Marie-Ève Bédard.

Celle-ci ajoute que les heures d'ouverture sont plus longues dans les GMF et que des consultations sans rendez-vous sont offertes, ce qui améliore l'accessibilité de la clientèle. «La prise en charge des patients est meilleure», dit-elle.

M. Blain n'est pas du même avis. «Plusieurs GMF n'offrent même pas d'heures plus longues ou de sans rendez-vous. Quel est l'avantage?», demande-t-il.

D'ici à 2013, Québec compte faire passer le nombre de GMF de 236 à 300.