Au début de la semaine, en commission parlementaire, le président de l'Agence de la santé et des services sociaux de Montréal, David Levine, s'est donné quatre ans pour décongestionner les urgences des hôpitaux montréalais.

«Je ne peux pas vous dire que je peux régler le problème d'ici un an ou deux. J'ai déjà essayé de prendre ce genre d'engagement dans le passé et ça n'a pas fonctionné. Mais si on est capable de faire travailler les omnipraticiens en équipes et d'organiser une première ligne forte, quatre ans, c'est légitime.»

Interpellé par l'opposition officielle au sujet des urgences constamment débordées, où les délais d'attente moyens oscillent constamment autour de 20 heures, M. Levine a montré du doigt les omnipraticiens, qui «n'ont pas permis de créer une première ligne forte en pratiquant dans des cliniques ouvertes de 9 à 5 et fermées durant la fin de semaine». David Levine s'est de nouveau engagé à ramener le temps d'attente moyen à 16 heures dans les hôpitaux de la région métropolitaine, ce qui est tout de même 4 heures de plus que la cible ministérielle pour l'ensemble des urgences du Québec, qui est de 12 heures.

David Levine et son équipe savent bien que la tâche est colossale. Le Dr Richard Lessard, directeur de la Santé publique, a expliqué aux députés que sa plus grande préoccupation concerne les conditions de vie socioéconomiques des patients de la métropole, notamment les enfants de 0 à 5 ans. À cet égard, on a rappelé que la population est plus pauvre à Montréal qu'ailleurs au Québec et qu'un enfant sur trois est vulnérable dans au moins une sphère de son développement, tant psychologique que physique, lors de son entrée à l'école.

Retenu en réunion toute la journée, hier, le haut dirigeant de l'Agence n'était pas disponible pour expliquer en détail à La Presse les mesures qu'il entend déployer pour atteindre ses objectifs. Il est clair, en tout cas, qu'il mise beaucoup sur la rénovation et la réorganisation des urgences de l'hôpital Jean-Talon et de l'Hôpital général juif (2012) ainsi que des hôpitaux de La Salle (2013), Maisonneuve-Rosemont (2015) et du Lakeshore, dont l'avant-projet est encore à l'étude. On prévoit aussi ouvrir cet automne une unité spécialisée de 27 places pour les troubles de comportement dans le territoire du CSSS Bordeaux-Cartierville-Saint-Laurent.

Approche gériatrique

L'Agence a aussi mis en relief le vieillissement de la population: on dénombre 5500 hospitalisations chaque année à cause d'une maladie chronique - troubles respiratoires, maladies cardiaques, diabète, dépression. «Il faut sortir les personnes en perte d'autonomie de nos hôpitaux, implanter une approche gériatrique, a dit M. Levine. En ce qui concerne les soins à domicile, il y a beaucoup trop d'attente pour obtenir les services d'infirmières auxiliaires.»

Après avoir tracé le portrait des patients qui séjournent dans les établissements de santé, l'Agence espère convaincre les élus de la Ville de Montréal de mettre sur pied un «centre de répit ou de dégrisement» au centre-ville. On veut aussi accroître l'offre de logement social permanent ou transitoire pour la clientèle vulnérable et améliorer le suivi dans la communauté. Évidemment, l'ambitieux plan comprend des mesures pour recruter, motiver et conserver la main-d'oeuvre dans le secteur de la santé, a ajouté M. Levine.

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LA SANTÉ À MONTRÉAL

86 établissements, 89 000 employés, 3440 spécialistes et 2330 omnipraticiens;

> 69% de la population montréalaise déclare avoir un médecin de famille (63% en 2007);

> 15,5% de la population a 65 ans et plus (13,5% dans le reste du Québec);

> Un nouveau-né sur deux est de mère immigrée;

> Trois Montréalais sur dix (30%) vivent sous le seuil de la pauvreté.