Dans un rapport rendu hier, la coroner Catherine Rudel-Tessier s'interroge sérieusement sur la qualité des soins offerts au centre d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) Vincenzo-Navarro de Saint-Léonard. La coroner demande même à l'agence de la santé et des services sociaux de Montréal de «vérifier la qualité des soins offerts ainsi que la tenue des dossiers» dans cet établissement privé de la métropole.

Kenneth Boyle, 89 ans, vivait depuis plusieurs années au CHSLD Vincenzo-Navarro. L'homme présentait un état de santé plus que précaire. Il souffrait d'anémie, d'épilepsie, de dépression, d'insuffisance rénale chronique, de maladie cardiaque et était porteur du VIH contracté à la suite d'une transfusion. Il présentait aussi une maladie pulmonaire qui le forçait à recevoir constamment de l'oxygène.

Entre août 2009 et son décès survenu en mars 2010, plusieurs rapports d'incidents et d'accidents ont été remplis. Car M. Boyle chutait souvent.

Le 27 janvier 2010, il a été victime d'une grave chute. Malgré ses douleurs, il n'a accepté d'aller à l'hôpital que le 29 janvier. On lui a alors prescrit de la morphine.

De retour au CHSLD Vincenzo-Navarro, M. Boyle a chuté de nouveau le 1er février. Puis le 12 et le 14 février. Son état s'est détérioré. M. Boyle mangeait de moins en moins. Il était de plus en plus confus. Il refusait parfois de porter son tube nasal qui l'alimentait en oxygène. Il a chuté de nouveau le 21 février.

Trois jours plus tard, la coordonnatrice des soins a recommandé que la médication de M. Boyle, qui était très lourde, soit revue. Mais «il n'y a aucune note au dossier démontrant que le médecin a revu M. Boyle [la dernière note médicale date du 2 février 2010]», note la coroner dans son rapport.

L'état de M. Boyle était si dégradé que les soins de confort ont débuté le 27 février. Il a ensuite reçu régulièrement de la morphine. Le 8 mars, il est décédé. Le médecin d'Urgences-Santé qui est venu constater son décès a alerté le coroner car, selon lui, le dossier était «mal tenu» et «il y aurait eu une administration de médicaments inappropriée».

«Plusieurs questionnements»

La coroner Rudel-Tessier estime que le dossier de M. Boyle «entraîne plusieurs questionnements». «Alors que celui-ci est très malade et en phase de soins de confort, il ne semble pas bénéficier d'un suivi médical serré et cela malgré les remarques de la directrice des soins sur l'importance de revoir l'ensemble de la médication».

La coroner note aussi qu'il est «très difficile de savoir quels médicaments ont été pris (ou pas) par le patient» puisque «la feuille est à peu près illisible». La coroner recommande donc aux ordres professionnels impliqués d'enquêter afin de savoir si «les gestes posés l'ont été dans les règles de l'art». Elle demande également à l'Agence de la santé et des services sociaux de vérifier la qualité des soins offerts au CHSLD Vincenzo-Navarro.

Le directeur général du CHSLD Navarro, Jean Roy, dit avoir déjà rencontré l'agence de la santé de Montréal et avoir ouvert une enquête en interne. «Il y a des présomptions dans le rapport du coroner et on veut faire la lumière là-dessus», a affirmé M. Roy.