Les médecins résidents, qui réclament des quarts de travail plus courts, ne sont pas au bout de leurs peines. Le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) conteste en Cour supérieure la décision d'un arbitre qui le force à faire passer leurs périodes de garde de 24 à 16 heures d'ici six mois.

Le CUSM, qui chapeaute 14 hôpitaux où travaillent plus de 1000 résidents, dit avoir déposé une requête en révision judiciaire pour retarder l'entrée en vigueur des gardes écourtées. «Le prolongement du délai ferait en sorte que ce changement important pourrait entrer en vigueur au début de l'année universitaire plutôt qu'en milieu de trimestre, ce qui faciliterait la transition», explique le Dr Meterissian, vice-doyen de l'enseignement médical des deuxième et troisième cycles.

Mais, dans sa requête, le CUSM va beaucoup plus loin et demande à la Cour supérieure de déclarer illégale la décision de l'arbitre Jean-Pierre Lussier, qui estime que l'obligation de travailler 24 heures d'affilée contrevient à la Charte des droits et libertés.

Le CUSM estime que l'arbitre n'avait pas le pouvoir de rendre une telle décision. L'institution déplore qu'il n'ait pas exigé que les médecins résidents démontrent que les quarts de 24 heures compromettent leur sécurité et celle de leurs patients. La requête précise qu'un tel changement aurait des «conséquences drastiques et très sérieuses» sur la qualité des soins puisqu'il entraînerait davantage de transferts de dossiers de patients et de risques d'erreur.

La durée des quarts de travail est, avec la rémunération, l'un des enjeux centraux des pourparlers autour du renouvellement de la convention collective des résidents. Ceux-ci ont d'ailleurs suspendu leurs activités d'enseignement depuis une semaine et menacent de débrayer pour tenter d'accélérer les négociations avec le gouvernement.

La Fédération des médecins résidents du Québec s'explique mal le geste du CUSM puisqu'une première tentative d'empêcher l'arbitre de trancher avait échoué. «Depuis le début, les établissements sont réfractaires au changement; on dirait qu'ils persistent dans leur résistance», s'indigne le président de la Fédération, le Dr Charles Dussault.

La contestation du CUSM a même surpris le ministère de la Santé, qui dit avoir informé le CUSM de son intention d'accepter la décision de l'arbitre. Le gouvernement compte même réduire les périodes de garde des résidents de tous les hôpitaux québécois dans le cadre des présentes négociations. «Nous visons 16 heures», confirme Marie-Ève Bédard, porte-parole du ministre Yves Bolduc.

Le Ministère est d'autant plus surpris que des comités sont déjà en place pour planifier la transition. Selon Mme Bédard, quelques hôpitaux offrent déjà sans problème des quarts de garde de 16 heures. «On sait que c'est faisable. En somme, ça ne donne pas moins d'heures de garde, mais il faut les réorganiser», dit-elle.

Contrairement aux médecins qui sont payés à l'acte, les résidents reçoivent un salaire fixe. Attachés à un hôpital, ils sont tenus de s'y trouver durant leurs quarts de garde. En théorie, ils devraient avoir droit à des périodes de repos, mais ils peuvent rarement s'en prévaloir en raison de la surcharge de travail. Un régime épuisant, dénonce leur Fédération.