Les dentistes partent en guerre: ils refusent de céder devant les hygiénistes dentaires qui demandent plus d'autonomie et ils désavouent le comité mis en place par le gouvernement pour trouver un compromis.

Les dentistes feront connaître leur position officielle mardi, mais dans une entrevue à La Presse Canadienne lundi soir, la présidente de leur Ordre, Diane Legault, a voulu réagir aux revendications récentes des hygiénistes.

À l'instar de leurs consoeurs d'autres provinces, les hygiénistes veulent pouvoir exercer leur travail de prévention dans leurs propres bureaux, dans les CHSLD, dans les domiciles, sans avoir à demander une autorisation du dentiste. Selon elles, cette tutelle est un héritage archaïque de la domination paternaliste d'une profession traditionnellement masculine sur une autre féminine. En ce sens, elles ont déposé une pétition de 5600 noms à l'Assemblée nationale.

Au sortir de son assemblée annuelle lundi, Diane Legault a opposé un refus net. À ses yeux, les exigences du collectif des hygiénistes vont à l'encontre des tendances vers l'intégration et la multidisciplinarité.

«(Dans les soins dentaires) le pilote, c'est le dentiste, et bien sûr que le dentiste travaille en équipe, parce que c'est la synergie de l'équipe qui sert au mieux la population», a-t-elle dit, en citant en exemple les équipes dans le domaine médical. Elle refuse donc la possibilité pour les hygiénistes d'ouvrir leur propre cabinet.

De même, la nouvelle réglementation entrée en vigueur en Ontario qui élargit l'autonomie des hygiénistes «n'a pas fait de raz-de-marée», a poursuivi Dre Legault: l'organisation des soins dentaires demeure largement identique à ce qu'elle était, selon ses indications.

Aussi conteste-t-elle l'évaluation du collectif d'hygiénistes qui affirme que les tarifs diminueraient avec de nouveaux concurrents et avantageraient la population.

Par ailleurs, l'Ordre des dentistes est tout aussi opposé à la solution trouvée par l'Office des professions du Québec pour rapprocher les parties: la mise en place récente d'un comité de travail dirigé par un médecin, le Dr Roch Bernier, qui a déjà proposé des pistes dans ce domaine il y a près d'une dizaine d'années, mais qui n'ont pas été retenues.

Diane Legault trouve «inacceptable» la nomination d'un médecin, a fortiori un médecin qui n'a pu résoudre le problème il y a quelques années. Il aurait fallu un dentiste, plaide-t-elle, et elle ne craint pas du tout d'être accusée de partialité.

«On va se faire reprocher n'importe quoi, c'est sûr! Mais on n'est plus à l'ère de la domination. Quand ils ont fait (des démarches similaires) en santé physique, (les responsables de l'Office des professions) ont mis un médecin (à la tête du comité), quand ils ont fait ça en santé mentale, ils ont nommé un médecin. Ça a du sens. Personne ne s'est insurgé contre ça. Moi je dis que quand c'est le secteur de la santé dentaire, ça devrait être un dentiste.»

Mme Legault souhaite qu'on revienne à l'entente qui a été convenue en décembre 2010, qui ralliait aussi l'Ordre des hygiénistes, avant que sa rédaction juridique dans les mois qui ont suivi n'éloigne les parties.