La mort d'une femme de 42 ans aurait pu être évitée si une intervention médicale plus rapide et mieux coordonnée avait été pratiquée, conclut un rapport du coroner publié hier.

En septembre dernier, Annette Lespérance est retrouvée inconsciente dans sa résidence de la petite municipalité de Pontiac, en Outaouais, à la suite d'une rupture d'anévrisme. Les secours sont immédiatement appelés, soit vers 19h45. La femme est d'abord transportée au Centre de santé et de services sociaux (CSSS) de Pontiac, puis au Centre hospitalier Shawville.

À 21h30, des examens révèlent qu'elle souffre d'hémorragies importantes au cerveau. Entre 22h et 23h, on tente de la transporter au CSSS de Gatineau. Le transfert est refusé en raison du manque de lits aux soins intensifs. Un transfert au Centre hospitalier d'Ottawa est également refusé.

Vers 23h15, l'Hôpital neurologique de Montréal (HNM), situé à 275 kilomètres de là, accepte de prendre la victime. Mais durant 45 minutes, l'établissement tente toutefois de faire admettre Mme Lespérance au CSSS de Gatineau ou au Centre hospitalier d'Ottawa, puisqu'un long transport en ambulance est risqué.

Devant cet échec, le HNM recommande de procéder à la vidange des ventricules cérébraux avant le départ, ce qui est également refusé. La patiente arrive dans la métropole vers 3h48. Elle meurt quelques heures plus tard, vers 10h30.

Question du coroner

Dans son rapport, le coroner Paul G. Dionne écrit qu'il a de la difficulté à comprendre pourquoi on a refusé de faire la vidange des ventricules avant le transfert à Montréal. «Selon les médecins de l'Institut neurologique de Montréal, en procédant ainsi, les chances de survie de la victime sont augmentées de 50%», écrit-il dans son rapport.

Il s'est également dit «surpris» de la collaboration «déficiente» entre le CSSS de Gatineau, l'Institut neurologique de Montréal et ses partenaires régionaux comme l'hôpital d'Ottawa.

Selon le coroner Dionne, le cas de Mme Lespérance rappelle celui de Jean-Philippe Rochon, jeune homme de 25 ans mort en septembre 2007 au Centre hospitalier d'Ottawa à la suite de délais de transfert en traumatologie.

«Des problèmes étaient identifiés en septembre 2007, mais très peu fut fait pour régler ce problème avant janvier 2010», remarque le coroner Dionne dans son analyse. «La cause exacte de ces délais à rectifier la situation apparaît nébuleuse, mais semble vouloir se corriger suite aux interventions en cours.»

À la suite de la mort de Mme Lespérance, l'Agence de la santé et des services sociaux (ASSS) de l'Outaouais a décidé de réviser ses corridors de services. Des médecins et des gestionnaires des établissements du territoire de l'Outaouais planchent à revoir le processus de transfert. Le CSSS de Gatineau travaille à la mise sur pied d'un protocole de transfert «plus clair et plus fluide».

Deux cas différents

En entrevue avec La Presse, le président-directeur général de l'ASSS de l'Outaouais s'est défendu d'avoir attendu deux ans avant de rectifier le tir, puisque le décès de M. Rochon est lié au service de la traumatologie et celui de Mme Lespérance à celui des soins intensifs.

Pour éviter d'autres décès comme celui de Mme Lespérance, le coroner recommande qu'un plan régional intégré de transferts pour les cas de soins intensifs soit mis sur pied en Outaouais et cimenté par des ententes formelles.

Il suggère également au Collège des médecins d'étudier le cas «qui de toute apparence soulève la problématique du médecin qui se retrouve dans des situations cliniques où il manque de ressources nécessaires et où les conséquences peuvent être dramatiques».