L'hôpital de la Cité-de-la-Santé à Laval possède des urgences parmi les plus efficaces de la province. Mais ces belles performances sont plus que jamais menacées. Car l'établissement croule sous le nombre de patients, et n'a plus les ressources pour tous les soigner, a appris La Presse.

«On a une augmentation croissante du nombre de patients aux urgences. Mais on n'a plus les ressources pour s'assurer de les traiter en sécurité», affirme le chef du service des urgences de la Cité-de-la-Santé, le Dr Jacques Ouellet.

La situation est si critique que la Cité-de-la-Santé a alerté la Direction nationale des urgences le printemps dernier. «On n'a pas eu de nouvelles, dit le Dr Ouellet. On a refait notre présentation en janvier. On tarde à vouloir agir ici, mais le temps presse.»

Dans sa présentation, la Cité-de-la-Santé écrit que «les pratiques cliniques sont à risques pour les patients et les employés».

De nouvelles urgences ont été construites en 2005 à l'hôpital. Mais depuis, le nombre de visites a augmenté de 12%, causant une pression énorme sur le service.

Les unités de débordement qui accueillaient en moyenne 36 patients en traitent maintenant 65 en moyenne. «C'est simple : mes lits sont toujours pleins», résume le Dr Ouellet.

La Presse a visité les urgences de la Cité-de-la-Santé la semaine dernière. Les deux unités de débordement étaient occupées par 70 patients.

Quand elles ont été créées, il y a huit ans, ces unités devaient être temporaires. Mais elles fonctionnent toujours à plein régime et ont été rénovées deux fois. L'hôpital reçoit même un budget récurrent pour ces lits. «On reconnaît que la Cité a besoin de ces lits, mais on ne nous donne pas l'argent pour construire de vraies installations», dénonce le Dr Ouellet.

Selon lui, la Cité-de-la-Santé «arrive au bout de sa corde». «Il n'y a plus de capacité d'accueil ici. Les volumes de patients dépassent l'offre de soins. C'est dangereux», dit-il.

Davantage d'ambulances

Pour ajouter à la pression, la Cité-de-la-Santé accueille un nombre croissant d'ambulances. De 2006 à 2009, l'établissement a reçu 2767 ambulances de plus que ce qu'il devrait. «Une pression quotidienne sans relâche qui met à risque la prestation de services», écrit la direction de l'hôpital.

Le directeur général de la Cité-de-la-Santé, Luc Lepage, affirme que son hôpital devrait recevoir au maximum 36 ambulances par jour. «Mais c'est toujours plus. Prenez hier, on en a reçu 53», a dit M. Lepage jeudi dernier.

En après-midi ce jour-là, 10 personnes venaient d'arriver par ambulance et le Dr Ouellet n'avait aucune place pour les accueillir. Les patients, surtout des personnes âgées, attendaient dans le couloir, couchées sur leur civière.

«Même si Laval a une population de 390 000 habitants, on reçoit l'argent pour desservir 220 000 patients, car on calcule que plusieurs personnes vont se faire soigner à Montréal. Mais dans les faits, bien plus de gens viennent se faire soigner ici, dit le Dr Ouellet. La demande est trop forte. Dans pas très longtemps, nous aurons les urgences les plus occupées du Québec.»

Davantage de lits

Selon M. Lepage, le gouvernement doit rapidement investir pour permettre à la Cité-de-la-Santé d'ouvrir 40 lits de courte durée supplémentaires. «Pour trouver l'espace, on déménagerait entre autres certains bureaux administratifs dans des roulottes», dit M. Lepage.

Le directeur souhaite également obtenir du financement afin d'éliminer les unités de débordement. La Cité-de-la-Santé planche finalement sur la création d'»urgences satellites» dans le quartier Sainte-Rose à Laval. «Laval n'a qu'un seul hôpital, qui manque de ressources. Pour offrir un meilleur service, on voudrait des urgences satellites à Sainte-Rose, mais aussi dans d'autres quartiers», annonce-t-il.

Questionné à ce sujet, le ministre de la Santé, Yves Bolduc, dit qu'il étudie la possibilité de créer plus de lits à Laval. «On veut aussi créer plus de places en hébergement», dit-il.

Le Dr Ouellet espère que les solutions seront rapidement mises en place. Car le temps presse. «Nos solutions proposées ne prendraient que 18 mois à mettre en place. Oui, Laval a besoin d'un deuxième hôpital. Mais ça prend au moins sept ans à construire, dit-il. Les besoins sont là maintenant.»