La construction du CHUM ne débutera pas l'an prochain comme s'y était engagé le gouvernement. Le choix du consortium chargé de construire le grand hôpital universitaire est reporté à la fin de l'automne 2010.

En conférence de presse, le président de l'Agence des partenariats public-privé du Québec, Normand Bergeron, a contredit le ministre de la Santé, Yves Bolduc. Ce dernier avait soutenu à La Presse, il y a un mois, que les échéanciers seraient respectés même si les deux consortiums en lice pour construire le CHUM n'avaient pas avancé leurs travaux depuis six mois. Les deux groupes ont obtenu du gouvernement que le «perdant» puisse récolter 15 millions pour le travail réalisé afin de préparer sa soumission. En février 2009, en conférence de presse avec une brochette impressionnante de ministres, le premier ministre Charest avait indiqué que les appels d'offres pour le CHUM seraient déposés au printemps 2010, que le choix du gagnant se ferait en juin et que les travaux débuteraient au début de l'automne. «Le choix du soumissionnaire est prévu pour la fin de l'automne prochain», a soutenu M. Bergeron. À La Presse, la ministre Gagnon-Tremblay a indiqué que Québec avait accepté de donner l'assurance de 15 millions exigée par les deux groupes. «Il ne s'est rien fait pendant six mois», a-t-elle dit. Vérification faite, rien n'est encore en marche chez les deux consortiums. On attend une lettre officielle de Québec.

La présidente du Conseil du Trésor, Monique Gagnon-Tremblay, a déposé hier le projet de loi qui transformera l'Agence des PPP en Infrastructure Québec. La formule PPP a «soulevé des critiques et de la résistance», a-t-elle relevé. La population a eu, à tort, l'impression que la majorité des travaux se feraient désormais en partenariat public-privé. Or, des 42 milliards de travaux que lancera Québec dans les prochaines années, moins de 10 % se feront selon cette formule.

«Carrefour d'expertises»

Infrastructure Québec, qui compte une trentaine d'employés afin d'étudier une dizaine de projets par année, n'aura pas davantage de ressources pour son nouveau mandat, qui consistera à «contrôler les échéanciers et les budgets» pour l'ensemble des projets de construction de plus de 40 millions lancés par les ministères et organismes. Dans tous les cas, le Ministère conservera la maîtrise d'oeuvre de son chantier, a assuré Mme Gagnon-Tremblay. Infrastructure Québec sera «un carrefour d'expertise» pour ces grands projets, auquel devront «s'associer» les ministères, a-t-on expliqué. L'ancienne agence se finançait à même des honoraires imposés aux ministères clients. Selon la nouvelle formule, Québec devra consentir plus d'argent pour cette nouvelle agence.

Dans l'opposition péquiste, Sylvain Simard s'est vite «réjoui de la disparition de l'Agence des PPP, cela fait cinq ans que je me bats pour qu'elle disparaisse».

Selon lui, «on tourne la page des PPP» à tout prix, pour ramener à sa place ce mécanisme -»un des volets possibles pour la construction d'infrastructures publiques». Il est passablement sceptique quant à la capacité du futur organisme «qui n'a pas de vrais moyens» de contrôler coûts et échéanciers d'une multitude de projets. «Le texte du projet de loi est extrêmement flou», a-t-il constaté. En évitant de se doter de procédures très strictes, la ministre ne parviendra pas à limiter les coûts et les délais, «alors pourquoi une nouvelle structure ?» s'est interrogé M. Simard.

Réjean Parent, de la Centrale des syndicats du Québec, a aussi salué la fin de l'agence sur les partenariats public-privé. «Les opposants aux PPP provenant principalement du mouvement syndical» ont souvent été qualifiés de «démagogues, dinosaures, corporatistes, passéistes», a rappelé M. Parent. Or, après cinq ans, le bilan des PPP est inquiétant. Le CHUM n'est pas encore commencé, et le coût des travaux de la salle de l'OSM et du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) ont monté en flèche. «Au bout du compte, on peut se demander combien de projets ont été retardés et combien d'argent a été gaspillé en raison de cet entêtement des libéraux», a lancé M. Parent.