Des groupes craignent que l'accès à l'avortement soit menacé par une nouvelle loi qui impose une série de contraintes aux cliniques privées qui pratiquent cette intervention. Ils ont demandé au gouvernement de réviser la loi, hier, tandis qu'une clinique du centre-ville de Montréal faisait savoir qu'elle cessera de pratiquer des avortements fin septembre.

La clinique de L'Alternative, dans le quartier Centre-Sud, a informé le ministère de la Santé qu'elle cesserait de pratiquer des avortements à compter du 30 septembre. Elle continuera toutefois d'offrir d'autres services, notamment le dépistage des maladies transmises sexuellement.

Les quelque 1000 femmes qui se rendent à L'Alternative pour subir une interruption de grossesse volontaire devront donc se tourner vers les hôpitaux et les autres établissements.

«Ça va venir accentuer les problèmes d'accès et de délais d'attente qui sont déjà importants dans certaines régions», estime Nathalie Parent, coordonnatrice de la Fédération du Québec pour le planning des naissances.

Dans la foulée du jugement Chaoulli, qui forçait Québec à ouvrir la porte au privé dans la santé, le gouvernement a adopté la loi 34 le printemps dernier. La loi vise à encadrer une cinquantaine d'interventions pratiquées dans des cliniques qui ne font pas partie du réseau public.

Pour se conformer aux nouvelles exigences de la loi, la clinique de L'Alternative aurait dû transformer la pièce où sont pratiqués les avortements en un véritable bloc opératoire. Elle aurait dû s'équiper d'un mécanisme pour changer l'air, stériliser la salle de fond en comble, doter les médecins de vêtements pour chirurgiens.

Tout cela alors que les interruptions volontaires de grossesse sont une intervention relativement simple, explique la directrice de la clinique, Micheline Dupuis.

«L'avortement est une intervention mineure et on nous demande de rendre ça majeur», a résumé Mme Dupuis.

Elle précise qu'aucune patiente de sa clinique n'a jamais connu de complications «majeures»

à la suite d'un avortement.

Révision demandée

La Dre Corinne Leclercq, présidente de l'Association des obstétriciens et gynécologues du Québec, demande au gouvernement de réviser la loi 34. Elle souhaite que Québec retire l'avortement de la liste des chirurgies qu'elle encadre.

«Ce n'est pas la clinique qui est fautive, c'est le projet de loi qui est fautif, a-t-elle tranché. Pour la femme, c'est encore un recul. Il faut encore qu'elle se batte pour avoir le droit à l'avortement. Et ce droit vient d'être en partie diminué.»

La porte-parole du ministère de la Santé, Marie-Claude Gagnon, rétorque que c'est le Collège des médecins qui a recommandé au gouvernement d'inclure l'avortement à la liste des interventions encadrées par la loi 34.

De son côté, l'Agence de la santé et des services sociaux de Montréal craint que d'autres cliniques privées n'emboîtent le pas à L'Alternative. C'est pourquoi son président, David Levine, présentera lundi un plan pour assurer l'accès à l'avortement.

Le tiers des grossesses se terminent en avortement au Québec.