Les résultats des tests médicaux de plus de 2000 Québécoises atteintes du cancer du sein seront revus d'ici la fin de l'année pour déterminer si elles ont eu le bon type de traitement, a annoncé hier le ministre de la Santé, Yves Bolduc.

On estime que pour 5% des cas environ, une centaine de patientes, un changement de traitement sera indiqué. L'opération remontera jusqu'au 1er avril 2008. Pour des cas aussi récents, un changement de traitement sera aussi efficace que si on avait pris d'abord la bonne décision.

Rendant public jeudi le rapport du comité spécial formé pour vérifier les résultats d'une étude du président des pathologistes, Louis Gaboury, le ministre Bolduc a relevé que les laboratoires de pathologie au Québec étaient fiables, «qu'il n'y a aucune raison de mettre en doute la qualité de leurs analyses», a-t-il souligné.

Souci de précaution

Président du comité, l'oncologue André Robidoux, du CHUM, a soutenu que des études devront être refaites «par souci de précaution», mais, selon les spécialistes, il n'y a pas «de pertinence clinique de refaire quelque analyse que ce soit». «On aurait pu dire qu'aucun test ne serait refait, mais cela n'aurait pas rassuré les patientes», selon le spécialiste.

Dans tous les cas, insiste le médecin, on parle de patientes qui ont eu un diagnostic de cancer, un test qui, lui, ne prête pas à interprétation. Dans l'ensemble des patientes atteintes, certaines auraient dû avoir un traitement différent, après des tests où il y a inévitablement une part d'interprétation. «Variation, discordance de ce qui a été observé par le Dr Gaboury ne veut pas dire erreur de diagnostic», a insisté le spécialiste.

Les résultats des tests seront retournés à des laboratoires qui appliquent des contrôles de qualité externes - 67% d'entre eux le font. Personne n'aura à retourner subir de nouveaux tests. On procédera à partir du matériel déjà prélevé.

Dans environ 850 cas, on refera le test sur les marqueurs HER-2, pour les patientes qui ont un cancer du sein infiltrant, qui sont négatives aux tests HER, et dont la tumeur était de 1 cm ou plus.

Pour les 1250 autres cas, on réanalysera les spécimens de tumeurs dans les cas de cancer infiltrant qui ont donné un résultat négatif aux récepteurs hormonaux, ou avec moins de 10% de cellules positives.

Jeudi, le ministre Bolduc a martelé que depuis le début de la tempête, il s'était imposé la plus grande prudence, et qu'il avait préféré attendre le rapport des experts.

Toute la controverse dans les médias a eu comme «dommage collatéral l'anxiété chez les patientes», a déploré le Dr Bernard Têtu, du CHUQ. Pour le Dr Robidoux, le rapport «n'est pas une réponse politique» même si les spécialistes estiment qu'une revue des tests n'est pas scientifiquement nécessaire, «il importe avant tout de rassurer les patientes», insiste-t-il.

Pour lui, cela ne veut pas dire que tout fonctionne parfaitement dans les laboratoires de pathologie. Comme dans les salles d'opération, il manque d'effectifs, de moyens, il y a un surcroît de travail, «mais les tests se font tout de même, on procède à des opérations».

Pour le ministre Bolduc, le gouvernement reste exposé à des poursuites, à un recours collectif de patientes qui n'auraient pas eu le traitement recommandé pour leur cancer. En fait, indique-t-on par ailleurs, ces risques de poursuites sont la principale raison qui a décidé Québec à ne pas trop remonter dans le temps, à fixer la frontière à avril 2008. Si des «faux négatifs» sont découverts, comme leur premier test ne remonte pas avant avril dernier, l'autre traitement sera tout aussi efficace que s'il avait été prescrit dès le début, a expliqué le Dr Robidoux, bien plus vague sur les cas antérieurs à la limite fixée par Québec.

La réévaluation des tests devrait être terminée avant la fin de l'année.

Double langage

Pour le président de la Fédération des spécialistes, Gaétan Barrette, «le gouvernement applique la recommandation qu'on avait faite. On est déçus devant le double langage, on dit en même temps que le système est correct, mais qu'on reteste tout de même. À tout le moins, la décision améliore les choses», a lancé le Dr Barrette. Pour lui, il faudra vérifier à terme ce qui a été constaté dans la nouvelle batterie de tests.

Pour le Dr Yves Lamontagne, le président du Collège des médecins, les partis de l'opposition à l'Assemblée nationale ont inutilement ameuté la population avec les constats du Dr Gaboury. «Au lieu de faire de la petite politique, ils auraient dû attendre les résultats. J'ai été choqué par les politiciens», a-t-il soutenu.

Du côté du PQ, on était moins agressif, soutenant que la décision aurait dû se prendre plus rapidement. Le ministre Bolduc «doit reconnaître l'erreur du gouvernement d'avoir tardé à assurer un meilleur contrôle de la qualité des laboratoires», a estimé Bernard Drainville, critique à la santé.

Des femmes seront encore pendant des semaines aux prises avec l'inquiétude.