Sylvie Chalifour connaît bien le cancer du sein: cette technicienne en radiologie travaille quotidiennement avec des victimes de la maladie. Et elle en est atteinte pour la seconde fois en quatre ans. Depuis quelques jours, cette résidante de Laval est prise d'un affreux doute: et si elle n'avait pas été traitée correctement la première fois?

Des centaines de Québécoises s'inquiètent de l'étude de l'Association des pathologistes du Québec, qui a révélé cette semaine que 15% à 20% des tests de marqueurs hormonaux dans les laboratoires publics pourraient être erronés. Et certains spécialistes critiquent ses auteurs pour avoir semé l'angoisse chez les patientes.

 

Le Dr Pierre Dubé, de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, est un chirurgien oncologue spécialisé en cancer du sein. Toutes les patientes qu'il a vues hier l'ont questionné sur cette étude. Et des dizaines d'autres ont appelé son cabinet.

«On a fait paniquer des milliers de patientes aujourd'hui», déplore le spécialiste, qui estime que l'auteur de l'étude, le Dr Louis Gaboury, n'a pas pris compte de la réaction des patientes.

Le Dr Dubé ne doute pas de la véracité de l'étude, mais il souligne que les problèmes de fiabilité des tests en laboratoire étaient déjà connus. D'ailleurs, la grande majorité des patientes y sont soumises deux fois plutôt qu'une, afin de réduire les risques d'erreur. Et même si les tests se sont avérés erronés, cela ne veut pas nécessairement dire que la patiente a reçu un traitement inadéquat. Loin de là.

Ces tests ne servent pas à dépister le cancer comme tel, mais à en déterminer la nature précise une fois le diagnostic initial établi. Les oncologues s'en servent pour déterminer quel type de médicaments ils administrent à leurs patientes, en plus du cocktail habituel de la chimiothérapie, de la radiothérapie et de la chirurgie.

Voilà pourquoi celles qui combattent le cancer du sein, comme celles qui s'y sont frottées dans les dernières années, sont préoccupées. Cathy Ammendolea, vice-présidente du Réseau canadien du cancer du sein, rencontre des patientes presque tous les jours. Pas plus tard que jeudi, elle a parlé à une femme qui vient tout juste de connaître son «plan de traitement».

«Maintenant, elle se demande si ce sont les moyens appropriés de traiter la maladie», constate Mme Ammendolea, elle-même une survivante de la maladie.

Et même celles qui sont en rémission peuvent venir à douter, poursuit-elle. «C'est préoccupant, ça vous reste collé dans la tête, et ça alourdit un stress déjà énorme.»