Jeudi dernier, l'inspecteur Michel Martin a reçu la prestigieuse Citation du commissaire pour bravoure. Le policier de la Sûreté du Québec, maintenant à la retraite, est l'un des 15 lauréats de cette récompense qui vise à souligner leur courage exceptionnel. Les 14 policiers et 1 militaire ont sauvé plusieurs vies dans les minutes qui ont suivi le séisme du 12 janvier 2010, en Haïti. Michel Martin, alors commandant du contingent canadien, fut l'un des premiers à coordonner les efforts de sauvetage et à établir un lien avec la GRC à Ottawa. La Presse et Radio-Canada le nomment Personnalité de la semaine.

Port-au-Prince, en Haïti, le 12 janvier 2010. Il était 16 h 53. L'inspecteur Martin, alors commandant du contingent canadien, s'apprêtait à quitter son bureau quand les premières secousses se sont fait sentir. Michel Martin avoue que ce furent les 35 secondes les plus longues de sa vie. «Je n'oublierai jamais ce moment. Les objets projetés un peu partout dans la pièce. Les murs qui se fissurent. L'épaisse poussière qui t'empêche de respirer. Le plancher, sinueux, comme si d'immenses vagues passaient dessous. Et tout ce bruit.»

Quand les murs du quartier général des Nations unies ont cessé de trembler, Michel Martin s'est tout de suite mis au travail. En se dirigeant vers la sortie, il a réalisé qu'un Français manquait à l'appel. Sans hésiter, l'inspecteur a rebroussé chemin afin de le localiser. Le Québécois a fini par retrouver son collègue figé par la peur et caché dans un coin. En état de choc, l'homme a eu besoin d'aide pour sortir de l'édifice.

En voyant que la moitié de l'hôtel, qui servait de quartier général, s'était effondrée pendant le séisme, le commandant Martin a fait le décompte des membres de son équipe et a organisé les secours pour retrouver ceux qui manquaient à l'appel. Près de 100 policiers canadiens étaient alors en poste. Avec les débris qui bloquaient toutes les voies d'accès, l'inspecteur, aidé de ses collègues, a dû mettre sur pied une clinique de fortune afin de soigner les blessés.

Le commandant a ensuite réussi à contacter la GRC à Ottawa, grâce à un téléphone satellite branché à une génératrice. L'appareil de communication avait d'ailleurs été sauvé in extremis lors d'une secousse secondaire dévastatrice. «C'était le seul moyen de joindre l'extérieur, et en plus l'appareil ne fonctionnait pas au début. Tous les téléphones étaient hors d'usage», ajoute-t-il.

Le contingent canadien a perdu deux hommes lors du séisme: le sergent Mark Gallagher et le surintendant principal Doug Coates. En prenant la parole, lors de la remise des prix, Michel Martin a eu la gorge nouée en évoquant ses collègues disparus. «Doug était un modèle», s'est-il remémoré par la suite. L'inspecteur Martin l'a côtoyé lors de sa première mission en sol haïtien, en 2006-2007.

Lors de ce discours, Michel Martin a tenu à souligner le travail effectué par les policiers et les militaires canadiens en poste à Port-au-Prince. «Immédiatement après le séisme, plusieurs ont formé un convoi et se sont mis à fouiller les immeubles en ruines et les résidences, dans des conditions terrifiantes. D'autres ont assuré la protection de l'entrepôt de l'Organisation mondiale de la santé. L'édifice a été en partie détruit par le séisme.»

Dans les jours qui ont suivi, ce sont les Canadiens qui ont pris l'initiative d'accueillir à l'aéroport les équipes de secours provenant du monde entier et qui les ont escortées dans les différents quartiers de Port-au-Prince. Ils ont ainsi soutenu les efforts de plus de 75 équipes de sauvetage.

L'inspecteur Martin a accompli trois missions en Haïti. Sa dernière s'est terminée en janvier 2012. Le policier a ensuite pris sa retraite au terme d'une carrière de 33 ans. Il garde plusieurs bons souvenirs de cette expérience à l'étranger.

Michel Martin ne tarit pas d'éloges à l'égard des Haïtiens. «Ils ont une résilience incroyable qui m'impressionne. Malgré toutes les épreuves: tremblement de terre, tempêtes tropicales, manque d'eau, ou choléra, ils ne perdent jamais espoir. Ils ont aussi une foi inébranlable en Dieu qui les aide énormément. Je vais toujours garder le souvenir d'un peuple fort et souriant.»