Après avoir vécu comme un échec les Jeux paralympiques de Pékin, en 2008, le nageur Benoît Huot a brillamment rebondi à Londres, où il a reconquis son titre au 200 mètres quatre nages individuel. Sa prestation dans la capitale britannique, son impressionnant palmarès et ses qualités de meneur lui ont valu de porter le drapeau canadien à la cérémonie de clôture. La Presse et Radio-Canada le nomment Personnalité de la semaine, un honneur qui rejaillit sur l'ensemble des athlètes paralympiques québécois, qui se sont distingués à Londres.

Quand Chantal Petitclerc s'est retirée après sa récolte historique de cinq médailles d'or aux Jeux paralympiques de Pékin, le nageur Benoît Huot s'est demandé si le mouvement paralympique perdrait de sa visibilité au pays.

Son inquiétude ne s'est pas matérialisée. Huot n'oserait pas s'en vanter, mais il a largement contribué à l'intérêt suscité par les Jeux paralympiques de Londres, présentés du 29 août au 9 septembre. Par ses prestations, couronnées par trois médailles - une d'or, une d'argent et une de bronze - et sa personnalité engageante, qui n'est certainement pas étrangère à sa sélection comme porte-drapeau du Canada à la cérémonie de clôture.

Avant de pénétrer dans le Stade olympique bondé, Huot a pris une grande respiration: «Je me suis dit: «Ben, ça va durer trois minutes, profite de ce moment-là, savoure-le, ça n'arrive qu'une fois.» J'ai pris le drapeau, je l'ai levé bien haut et fièrement, et pendant trois minutes, j'avais le grand sourire aux lèvres. C'est le plus grand honneur sportif qu'on pouvait me faire.»

Cela concordait parfaitement avec l'attitude adoptée par le nageur montréalais lors des quatre années d'entraînement qui ont précédé les Jeux. Auréolé de gloire à Athènes avec six médailles, dont cinq d'or, Huot a vécu comme un calvaire les Jeux de Pékin, aussi spectaculaires fussent-ils. Diminué par un virus et rongé par le stress, il n'a pas éprouvé de plaisir en Chine. Oui, il a gagné quatre médailles de bronze, mais il a surtout échoué dans sa tentative de devenir le premier nageur paralympique à remporter la même épreuve trois fois de suite, terminant troisième du 200 m quatre nages individuel (QNI), sa course fétiche.

Le retour au pays a été pénible. Il avait perdu son proverbial enthousiasme. Sa blonde et sa famille ont dû l'aider à se relever. Avec l'aide d'un préparateur mental, Huot s'est promis de s'amuser durant tout le processus menant à Londres. Mission accomplie. Pour couronner le tout, il est monté sur la plus haute marche du podium au 200 QNI, améliorant sa propre marque mondiale au passage.

«Pékin m'a changé, souligne le gagnant de 19 médailles paralympiques. J'ai tellement appris sur moi comme athlète et comme personne. Je suis sorti de là gagnant. C'est pourquoi, personnellement, les Jeux de Londres ont été les plus grands et les plus beaux.»

L'enthousiasme des Londoniens, qui ont littéralement rempli la piscine et le stade, la qualité exceptionnelle de l'organisation et le respect ainsi que l'attention accordés aux athlètes, perceptibles autant dans les médias que sur les panneaux publicitaires, ont contribué à cette expérience unique.

Ces Jeux paralympiques ont également généré de l'intérêt au Canada. Huot en veut pour preuve les innombrables messages qu'il a vu passer dans les réseaux sociaux. La couverture médiatique a été appréciable, même s'il estime que la télévision aurait pu en faire plus. «La course de Valérie Grand'Maison [médaillée d'or au 200 QNI], les gens veulent la voir! s'enflamme Huot. Pour le commun des mortels, ce qui ne passe pas à la télé, ça n'existe pas. Je ne parle pas d'une couverture mur à mur, 24 heures sur 24, mais ça pourrait être mieux.»

Une mission

Refusant la comparaison avec André Viger et Chantal Petitclerc, des «légendes et des pionniers» qui l'ont inspiré, Huot est néanmoins lui aussi investi de la volonté de faire connaître la «cause». «Je dis «cause» et ce n'est pas innocent, explique l'athlète de 28 ans. Oui, c'est de la haute performance sportive. Mais je sens que j'ai le rôle et la mission, en tant qu'athlète paralympique, de faire connaître notre mouvement/cause.»

Douze ans après ses débuts paralympiques, Huot se fait encore quotidiennement demander ce qu'il fait là... Vrai que son handicap ne saute pas aux yeux. Il se lève de sa chaise, soulève le bord de son pantalon et défait sa sandale gauche: il a un pied bot, une malformation de naissance. La musculature du bas de sa jambe est considérablement atrophiée, sa cheville manque de mobilité et son pied est plus court, désavantage considérable pour fouetter l'eau au kick.

Comme pour tous les athlètes paralympiques, son handicap a été mesuré et classifié. Huot évolue donc chez les S10, catégorie de handicap physique le moins limitant. Il se mesure à des rivaux qui n'ont pas nécessairement le même handicap, mais dont la portée est équivalente. Et ainsi de suite pour les autres catégories. «Quand j'explique ça aux gens, ils disent: «Ah bon, alors ça a plein de son sens!»»

On sent qu'il a le goût de replonger, et il le fera, mais Huot refuse de s'engager pour les Jeux paralympiques de Rio de Janeiro, dans quatre ans. De jeunes nageurs plus performants pourraient émerger, note cet éternel compétiteur. Il y a également ses études universitaires en communications et administration, son désir de fonder une famille, ses aspirations professionnelles.

Chose certaine, le sport fera toujours partie de sa vie. À la fin de l'entrevue, Huot a mis ses trois précieuses médailles londoniennes sur la table, nous invitant à sortir celle en or de son coffret.

«Je veux faire grandir ce mouvement-là, dit-il avec passion. Vais-je le faire comme administrateur ou bâtisseur? Je ne peux pas le dire. Mais je vais certainement tout faire pour qu'aux yeux du grand public, cette médaille ait la même valeur que celle de Michael Phelps.»

RETROUVEZ LA PERSONNALITÉ DE LA SEMAINE SUR LES ONDES DE RADIO-CANADA