Pour agir dans le milieu complexe de la santé, il faut de la créativité, de l'imagination, du leadership. La nouvelle présidente de l'Association médicale du Québec, la docteure Ruth Élaine Vander Stelt, en poste depuis le 16 avril, défend avec conviction les idées qui ont jailli au cours de ses années de pratique. Cette femme qui consacre sa vie à soigner le plus grand nombre de patients, aux urgences, en clinique, en centre de soins ainsi qu'à domicile, qui enseigne, qui n'hésite pas à s'engager sur la place publique mérite l'admiration de La Presse et de Radio-Canada, qui la nomment Personnalité de la semaine.

L'année dernière, on comptait plus de 68 000 médecins au Canada. Il y en avait plus de 20 000 en 2010 au Québec seulement. Ces statistiques émanent de l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS). Il en est qui rêvent de voir tous ces experts en santé travailler de concert au véritable service aux patients, et régler une grande partie des problèmes de notre système de santé. Il en est aussi qui agissent.

Action et changement

D'entrée de jeu, Ruth Élaine Vander Stelt, deuxième femme nommée à la tête de l'Association médicale du Québec, affirme sa passion pour la médecine et sa mission fondamentale d'aider les gens. Elle est chef du service de médecine générale depuis 2009 au centre de santé et de services sociaux du Pontiac. Elle est aussi, notamment, coordonnatrice médicale d'une clinique de transition pour patients orphelins (ceux qui n'ont pas de médecin de famille). Cette initiative originale a permis de désengorger de façon significative les urgences de l'hôpital de Shawville. En outre, au cours des trois dernières années, plus du tiers des patients ont pu être jumelés à un médecin de famille. Ce projet a valu à la docteure le prix Coup de coeur du ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec en 2010.

«On doit faire avancer la médecine, dit-elle. Et aussi ne pas craindre de regarder, de s'inspirer de ce qui se fait ailleurs et qui réussit.» Par son dynamisme et son leadership, à son contact ou non, plusieurs autres ont aussi le goût de s'investir dans le changement. «J'ai moi-même eu, au cours de ma formation, plusieurs excellents mentors.»

Elle a fait ses études de médecine à l'Université Laval, à Québec. Juste avant, à l'Université McGill, elle a obtenu un baccalauréat en linguistique, français et théologie. À l'époque où elle a commencé à travailler, comme tout nouveau médecin, elle devait pratiquer pour un temps en région. Elle a choisi une communauté rurale et bilingue, et y a planté ses racines. Aujourd'hui elle ne souhaite pas la quitter. «Je me sens responsable de ma clientèle.»

Souffrance et vie

Ruth Élaine Vander Stelt est la mère de trois adolescents de 14, 16 et 18 ans. La famille comprend ses absences dues aux responsabilités qu'elle assume, un clan dont elle est très fière et qui partage, ce n'est pas un vain mot, les tâches ménagères, bien sûr, mais d'abord la soutient dans ses ambitions et ses rêves.

Ses parents sont d'origine hollandaise et ont immigré au pays dans les années 40. «J'ai grandi en anglais dans une région située au sud-ouest de l'Ontario. Et à 19 ans, au cours d'une mission avec l'organisme Katimavik, j'ai eu des amis québécois francophones, ce qui m'a donné envie de m'installer au Québec.»

Ruth Élaine a respecté dès sa prime jeunesse le mandat de vie que ses parents souhaitaient la voir accomplir: intégrer le mieux possible la société canadienne, être une bonne citoyenne. On l'encourageait à se dépasser. «J'ai longtemps pensé à la médecine comme carrière éventuelle, mais j'ai voulu d'abord tâter les médecines alternatives, le yoga, etc. J'ai finalement réalisé que je serais plus efficace, peut-être plus utile, à l'intérieur du système de la médecine traditionnelle.» Elle a obtenu son doctorat en médecine en 1992.

Très proche de la vie par ses choix, elle cultive aussi un grand jardin chez elle, à la campagne. «La vie est comme un jardin de fleurs, dit-elle, poétiquement. La fleur apparaît, vit et disparaît.» Comme tout médecin, elle côtoie la mort, et cette spiritualité naturaliste l'amène à penser qu' «il y a une vie après la mort, une autre dimension. Lorsque la souffrance physique augmente, et que le corps faiblit, la vie spirituelle prend son élan jusqu'à prendre toute la place. La pensée est de plus en plus élevée et fait paraître les choses terrestres, fortune ou autres, bien illusoires».

On doit faire avancer la médecine. Et aussi ne pas craindre de regarder, de s'inspirer de ce qui se fait ailleurs et qui réussit.