Déjà éclaboussés par un scandale en 2004, les agents doubles du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) se retrouvent de nouveau dans la tourmente à la suite d'une «formation» qui a dérapé, a appris La Presse. Des policiers membres du groupe visés par l'enquête ont déjà été affectés à d'autres tâches.

Cette fois, celui par qui le scandale arrive est un jeune aspirant qui a suivi une formation pour le moins particulière, il y a trois semaines.

«On l'a envoyé dans un bar où il a été contraint de "caler" cinq bières, de prendre ensuite le volant et de traverser l'île en auto», nous a raconté une source digne de foi.

De plus, toujours selon cette source, une agente double a baissé le pantalon de son jeune collègue et «a manipulé son sexe, pour voir de quelle façon il réagirait».

Quelques jours plus tard, l'aspirant a porté plainte aux Affaires internes de la police de Montréal et aurait même déposé une plainte d'agression sexuelle. Il aurait rencontré deux enquêteurs des affaires internes durant quatre à cinq heures et produit une déclaration vidéo.

Informé de cette affaire durant un voyage à l'étranger la semaine dernière, le directeur du SPVM, Marc Parent, a ordonné la tenue d'une enquête sur cette affaire. Selon nos sources, plusieurs membres de la division des enquêtes spécialisées seraient dans la lorgnette de la direction et au moins deux ont été affectés à d'autres tâches administratives. Un agent double a aussi été muté dans un centre d'enquête, a indiqué notre source.

Le SPVM a confirmé partiellement la nouvelle. Le commandant Ian Lafrenière a évoqué simplement que la division des affaires internes enquête «sur des allégations d'inconduite au sein d'une équipe des enquêtes spécialisées» et que les policiers visés ont été immédiatement affectés à des tâches administratives «le temps de cette enquête enclenchée à la suite d'une plainte provenant de l'interne».

M. Lafrenière n'a pas voulu donner plus de détails sur la nature des dérapages qui auraient été commis, mais il reconnaît que la consommation d'alcool serait au coeur de cette enquête. Il a aussi dit ne pas être au courant qu'il y aurait eu conduite en état d'ébriété.

Il reste à savoir si ces dérapages se sont produits durant les heures de travail.

Un précédent en 2004

Déjà en 2004, des agents doubles avaient fait l'objet d'une enquête pour une séance d'initiation qui aurait tourné en beuverie. Des aspirants auraient été forcés à boire de l'alcool au point d'en être malades, tandis que leurs collègues féminines auraient été «invitées» à se dévêtir faute de quoi elles ne seraient pas retenues, leur avait-on dit. Les actes disgracieux s'étaient déroulés dans les locaux du groupe, rue Hochelaga.

Le SPVM compte une quinzaine d'agents doubles permanents, communément appelés full patch. En raison des risques liés à ces fonctions, leur mandat est d'environ deux ans. C'est pourquoi des formations sont régulièrement nécessaires pour combler leurs rangs. Ce sont des policiers de métier de toutes origines, des hommes, des femmes, des jeunes ou des personnes plus âgées, à ne pas confondre avec les agents civils d'infiltration, ou agents sources. Ces derniers sont en général des individus qui frayaient déjà dans les milieux criminels et qui changent de camp pour aider la police contre rémunération ou promesse d'indulgence judiciaire.

Leur travail reste identique, à savoir fréquenter et infiltrer des groupes criminels. Mais les agents d'infiltration de la police de Montréal seraient la plupart du temps affectés à des missions à court terme, comme faire quelques transactions de drogue dans un bar.

Pour les habitués du milieu, ces agents qui doivent côtoyer des criminels et gagner leur confiance sans attirer l'attention se trouvent toujours forcément plus ou moins sur la corde raide dans leur travail.

Pour joindre Daniel Renaud en toute confidentialité: 514-285-7000, poste 4918