À la suite du dépôt du rapport du Vérificateur général hier soir, le maire de Montréal, Gérald Tremblay, vient d'annoncer l'annulation du contrat des compteurs d'eau attribué en décembre 2007 au consortium GÉNIeau.

Du même souffle, il a annoncé le départ du directeur général de la Ville, Claude Léger, et de Robert Cassius de Linval, directeur du Service des affaires corporatives de la Ville.

M. Léger a immédiatement été remplacé par Rachel Laperrière, directrice générale adjointe de la Ville.

Depuis plusieurs mois, la Ville était aux prises avec des allégations d'irrégularités entourant l'attribution de ce contrat à GÉNIeau, consortium formé des firmes d'ingénieurs Dessau-Soprin et Simard-Beaudry.

En avril, La Presse avait révélé que l'ancien président du comité exécutif de la Ville, Frank Zampino, avait séjourné à deux reprises sur le yacht de Tony Accurso, propriétaire de la firme Simard-Beaudry, alors que le processus d'appel d'offres pour ce contrat de 356 millions de dollars battait son plein.

L'histoire avait entraîné la démission de M. Zampino de son poste de vice-président de la firme... Dessau-Soprin chez qui il avait été embauché en janvier dernier.

Dans son rapport, le Vérificateur général (VG) Jacques Bergeron a clairement identifié «bon nombre d'irrégularités administratives, une gestion déficiente et plusieurs informations pertinentes aux élus».

Plus tôt ce matin, M. Bergeron en a rajouté, estimant que l'ensemble du dossier était allé «tros vite, trop gros, trop cher». Il en est arrivé à faire 58 constats plus accablants les uns que les autres.

À la suite d'une rencontre avec MM. Léger et de Linval, le maire a annoncé que les deux hommes quittaient leurs fonctions d'un commun accord avec lui.

Le contrat prévoyait l'installation de compteurs d'eau à des milliers d'industries, commerces et institutions ainsi que leur entretien pendant 15 ans. L'annulation du contrat coûtera 3,5 millions (1 % du prix total) aux Montréalais. À cela, il faut ajouter le coût des travaux déjà réalisés. 

Labonté réclame encore une séance spéciale

En point de presse, le chef de l'Opposition officielle, Benoit Labonté, a rappelé qu'il ne revient pas au maire mais au conseil de ville et aux conseils d'arrondissements d'annuler le contrat des compteurs d'eau. 

En conséquence, il réclame toujours la tenue d'une assemblée du conseil dans les plus brefs délais. Avant le 30 septembre en fait car après cette date, les municipalités entrent dans la période officielle de campagne électorale et les conseils ne siègent plus. 

Cette réunion réclamée est d'autant plus urgente dit M. Labonté que chaque jour qui passe risque de coûter plus cher en pénalités d'annulation aux citoyens. «Combien de millions le maire va-t-il demander aux Montréalais pour tenter de sauver sa carrière politique», a-t-il lancé, cinglant. 

Cela dit, M. Labonté a qualifié de «brutal» le rapport du VG. «Le maire Tremblay a failli à son devoir de contrôle», a-t-il dit.

«Il y a une limite à être crédule, a de son côté déclaré la chef de Vision Montréal, Louise Harel. Le maire aurait dû poser des questions au moment où les services centraux ont été écartés de ce contrat. À aucun moment le comité exécutif n'a été absout (par le vérificateur général), c'était au maire à informer le conseil municipal et le conseil d'agglomération.»

Elle soulève le peu de questionnement du maire. «À l'évidence, il ne peut pas être compréhensible que le maire n'ait pas cherché à savoir, si on ne lui a pas dit, pourquoi n'a-t-il pas posé de questions? C'est de l'ordre de l'impossible. Ce n'est pas une défense de dire qu'on ne le sait pas quand on assume les responsabilités de maire de la plus grande ville du Québec», a dit Mme Harel.

Questionné sur la demande de l'opposition, le maire Tremblay a de nouveau rejeté l'idée de tenir une assemblée municipale spéciale et une plénière visant à faire la lumière sur les compteurs d'eau. «Je ne veux pas faire de ce contrat un enjeu politique et que des gens en fassent de la partisannerie politique», a dit M. Tremblay qui s'en remet maintenant au jugement des Montréalais qui iront aux urnes le 1er novembre prochain.

Lessard demande plus de transparence  

Pour le ministre des Affaires municipales, le rapport du Vérificateur général de la Ville de Montréal dans le dossier des compteurs d'eau montre avant tout que des procédures «n'ont pas été suivies», mais ne démontre pas que des lois ont été transgressées.

Laurent Lessard refuse toutefois de blâmer Gérald Tremblay ou son administration. «C'est à la population de la Ville de Montréal de prendre ces décisions. Le maire reprend le dossier en mains, c'est ce qu'on lui demande. Comme ministre des Affaires municipales, je dois m'assurer que toutes les règles sont suivies», de lancer M. Lessard à la sortie de la réunion du caucus des députés libéraux. 

«Le constat est que des procédures administratives n'ont pas été suivies, en aucun cas on ne remet en question les lois, c'est dans le comportement. On a des attentes au niveau de la ville pour que soit encadré de façon plus rigoureuse le processus (d'attribution de contrat)», a souligné M. Lessard.

Il soutient avoir mandaté dès mardi matin ses fonctionnaires pour que les procédures soient renforcées. «Il y a eu des lacunes nécessairement. Quand il y en a il faut les corriger. Je constate que le maire a dit que si c'était à refaire il le ferait autrement, à partir de l'information démontrée par le vérificateur. Il doit faire en sorte que ce soit plus transparent» de résumer M. Lessard.

Québec constate avec satisfaction que le contrat été annulé, «c'est une décision de la ville de Montréal, je m'en remets à leur décision» a-t-il dit, relancé sur la pénalité de 3,5 millions $ prévue entre GENIeaux et Montréal en cas d'annulation du contrat.     



Photo: La Presse

Le ministre Laurent Lessard.