Le Directeur général des élections du Québec (DGEQ) enquête depuis le début du mois sur des allégations de financement illégal du parti du maire Gérald Tremblay pour la période de 2001 à 2007, a appris La Presse.

Des enquêteurs du DGEQ ont visité mardi, simultanément, les administrations d'une dizaine d'arrondissements montréalais afin de vérifier si elles détenaient des factures de la firme de relations publiques Octane. Selon nos informations, les arrondissements visités sont tous gérés par un maire ou une mairesse membre d'Union Montréal.

Les enquêteurs du DGEQ sont intervenus en même temps dans les arrondissements, afin d'être sûrs que des informations ne circuleraient pas d'un arrondissement à un autre avant d'avoir récupéré ce qu'ils cherchaient. Aucun arrondissement ne s'est opposé à leurs démarches.

Le DGEQ a recueilli des factures envoyées par la firme Octane dans plusieurs arrondissements, notamment Saint-Léonard et Verdun. Le directeur général de Saint-Léonard, Gilles Rainville, a dit à La Presse que les enquêteurs avaient demandé des factures pour la période de 2001 à 2004. «Ce sont des factures pour la production du journal de l'arrondissement, L'Événement, a dit M. Rainville. Je ne connais pas le mandat du DGEQ, mais habituellement, c'est de valider les dépenses électorales. J'ai demandé à nos employés de lui donner (à l'enquêteur) les informations qu'il demandait.»

Selon nos informations, l'administration de Montréal-Nord, qui n'a pas rappelé La Presse, a promis au DGEQ de lui faire parvenir les factures demandées. Aucune facture n'a été trouvée à LaSalle ni à Lachine. Même chose à Saint-Laurent, nous a dit Johanne Houde, porte-parole de l'arrondissement. «Un enquêteur du bureau du DGEQ est venu pour vérifier si des factures d'Octane auraient été payées en 2004, a-t-elle dit. Mais nous n'en avons pas trouvés.»

Dans Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, l'attaché politique du maire Michael Applebaum, Hugo Tremblay, a dit qu'aucun enquêteur ne s'est présenté à son arrondissement. Les administrations du Plateau-Mont-Royal et de Verdun n'ont pas rappelé La Presse.

Le DGEQ a procédé à ces visites après avoir recueilli des allégations voulant que des factures d'Octane aient été envoyées aux arrondissements sans que des services aient été fournis pour lesdites factures.

Le cas Outremont

Ainsi, selon les informations soumises au DGEQ, en octobre 2004, un membre éminent du parti Union des citoyens de l'île de Montréal (UCIM), aujourd'hui Union Montréal, aurait demandé à l'arrondissement d'Outremont de participer au règlement d'une dette que l'UCIM traînait vis-à-vis d'Octane depuis les élections municipales de 2001.

La somme d'argent ne pouvait être payée par l'UCIM car cela contrevenait aux articles de la loi sur le plafonnement des dépenses d'un parti politique en période électorale. On aurait ainsi demandé à Outremont de fournir 15 000 $ à Union Montréal. Outremont aurait accepté de donner 8000 $. Après en avoir fait la demande à l'arrondissement d'Outremont, La Presse a obtenu copie d'une facture de 8000 $ (9202 $ avec les taxes) envoyée par Octane le 26 octobre 2004 au directeur général de l'arrondissement d'alors, Pierre Chapuis.

La facture indique que la somme est due pour des «activités de communications : services-conseils auprès de la mairie et de la direction générale, services-conseils relatifs au développement de la cour de triage». La Presse a demandé au directeur actuel de l'arrondissement, Pierre Beaudet, de nous dire s'il existe des documents correspondant à ces services qu'Octane écrivait avoir fournis. «Pierre Chapuis n'a pas souvenir de ce mandat et nous n'avons aucun document archivé portant la mention de la firme Octane», a répondu M. Beaudet.

Chez Octane, jeudi, un associé, Pierre Hurtubise, a dit être au courant des démarches du DGEQ, mais a nié que le parti de Gérald Tremblay ait contracté une dette auprès de sa firme. «L'UCIM ne devait pas un sou à Octane, a dit M. Hurtubise. Toutes les factures de la campagne de 2001 ont été payées rubis sur l'ongle. On reconnaît le rôle du DGEQ de faire toute vérification appropriée. Nous n'avons pas été contactés par le DGEQ.»

Au sujet de la facture du 26 octobre 2004, il a ajouté : «Ce sont des services-conseils sur plusieurs mois qui ont été donnés à Outremont par voie orale (au téléphone ou lors de rencontres), notamment par moi et Jean Battah, auprès du maire Harbour et de son conseiller politique Jean-Claude Patenaude. C'est un montant général. Il n'y a pas de nombre d'heures précis.»

En 2004, Me Marc-André Fabien était président de l'UCIM. Invité à commenter, jeudi, il a déclaré : «Ce n'est que du mensonge.»

Même genre de réaction pour le maire Gérald Tremblay. «Selon les informations que nous avons, c'est totalement faux», a dit son porte-parole, Martin Tremblay, avant d'ajouter : «S'il y a des vérifications en cours effectuées par le DGEQ, on va attendre les conclusions et on va agir en conséquence.»