Soir de grande ouverture du 30e Festival de jazz. Stevie Wonder s'apprête à ouvrir le bal. Il pleut des cordes sur le centre-ville de Montréal. Les touristes affluent. Mais au lieu de défier la foule pour assister au spectacle, La Presse décide de tester le réseau d'autoroutes de la couronne nord, jusqu'à la 640, dans les Basses-Laurentides.

L'avenue Viger, à l'angle du boulevard Saint-Laurent, ressemble à un stationnement. Le viaduc enjambant l'autoroute Ville-Marie est bardé de cônes orange. La Presse tente de remonter vers la rue Saint-Antoine Est pour emprunter une bretelle du tunnel, direction Ouest. L'entrée est barrée. Les panneaux clignotants pour l'indiquer n'ont pas été activés. Idem à l'autre sortie. On décide de remonter Viger, vers l'Ouest, jusqu'au boulevard René-Lévesque.

Sous la structure du Palais des congrès, des automobilistes sortent de leur voiture. Gros festival de klaxons. Plusieurs ne se gênent pas pour passer un coup de fil sur leur téléphone cellulaire. Ou pour faire un doigt d'honneur à l'automobiliste qui colle derrière. Ou à celui devant, qui n'avance pas.

Trente minutes plus tard, on parvient à la rue Notre-Dame. Mais pour découvrir que toutes les bretelles d'accès de la 720 sont fermées en raison des travaux de nuit. La Presse s'engouffre dans les rues de l'arrondissement de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce pour rejoindre Décarie. Des panneaux préviennent qu'il y a des travaux à l'échangeur Dorval. Mieux vaut éviter l'autoroute 13 nord.

Il reste l'autoroute 15. La circulation est fluide. Tout le long du trajet, il y a des cônes alignés sur l'accotement. La bretelle pour emprunter la 640 Ouest est fermée. Il faut slalomer dans une sortie obscure indiquant Saint-Eustache à gauche. Toutes les bretelles de l'échangeur sont en construction. Encore un bouchon de circulation. Il est maintenant 22h30. La Presse a quitté le centre-ville il y a 1 h 30, bien après l'heure de pointe. En tout, il aura fallu compter 1h45 à l'auteure de ces lignes pour atteindre Oka, soit au moins 1 h de plus qu'à l'habitude.

Nombre record de chantiers

Ce genre d'aventure sur les autoroutes de la région de Montréal est monnaie courante cet été. Le nombre de chantiers routiers fracasse un record de tous les temps dans la région métropolitaine. Les automobilistes qui ont l'habitude d'avoir un «congé» de bouchons de circulation durant la période estivale doivent cette année affronter des heures de pointe aux allures de rentrée automnale. Et il ne s'agit là que de la pointe de l'iceberg, prévient le ministère des Transports, parce que les travaux continueront de s'intensifier au cours des prochains mois.

«C'est évident que, si on part du centre-ville et qu'on n'a pas planifié notre trajet, on va avoir des mauvaises surprises, indique Mario St-Pierre, de la direction des communications de Transports Québec. Et les chantiers diffèrent selon le temps qu'il fait et d'autres facteurs.»

Dans l'ensemble du Québec, les investissements pour retaper le réseau routier atteindront 3,7 milliards de dollars cette année et en 2010, soit presque l'équivalent du budget annuel de la Ville de Montréal. De cette somme, 471,2 millions sont consacrés à 73 chantiers montréalais, sans compter le pont Mercier. Laval compte 20 chantiers et la Montérégie, 288 pour l'Est et l'Ouest. Et 77 chantiers routiers sont actifs dans les Laurentides.

Évidemment, il n'y a pas de solution miracle pour circuler, à moins d'avoir son hélicoptère personnel. À Transports Québec, on indique «que les automobilistes pensent à tort qu'on peut offrir une voie de contournement ou des mesures de mitigation pour chaque chantier».

«Il y a trop de mouvance dans la gestion des chantiers, explique Mario St-Pierre de Transports Québec. Une journée, on va travailler sur telle bretelle d'un chantier puis une autre journée, ce sera une autre bretelle. Et puis, s'il y a de la pluie, on ne peut pas rouler de l'asphalte. Et on n'a pas l'habitude de rediriger les automobilistes vers le réseau relevant de la Ville de Montréal.»

M. St-Pierre ne manque pas de faire remarquer que les travaux sont aussi nombreux en soirée, la nuit, et particulièrement le week-end, où l'achalandage est moindre. Mais prix de consolation: le boom de réfection permettra d'avoir 71% de chaussée en bon état d'ici 2011, estime le Ministère. Ce qui permettra ensuite de passer en mode entretien, précise-t-on.