Se fera? Ne se fera pas? Une chose est sûre: le projet du Quadrilatère Saint-Laurent n'a pas fini de créer des remous. Les consultations publiques se sont terminées cette semaine avec les recommandations des citoyens et des organismes spécialisés. Résultat: quelques points positifs, beaucoup d'inquiétudes. Le point sur la situation.

La Société de développement Angus (SDA) projette de construire un édifice à bureaux de 12 étages et 300 000 pi2 du côté sud-ouest du boulevard Saint-Laurent, entre le Monument-National et la rue Sainte-Catherine. Selon le promoteur, Hydro-Québec doit être le principal locataire du bâtiment. Le rez-de-chaussée sera occupé par des commerces à vocation équitable et «responsable». Le projet, d'une valeur de 150 millions de dollars, s'inscrit dans une vaste opération de «requalification» du secteur et dans la mouvance du Quartier des spectacles.Les ajustements

À la suite des recommandations de trois comités-conseil (Conseil du patrimoine, Comité d'architecture et d'urbanisme, Comité consultatif d'urbanisme de l'arrondissement), qui critiquaient la hauteur et l'emplacement de l'édifice, la SDÀ a accepté de revoir son projet. Elle a réduit le nombre d'étages de 15 à 12, et la hauteur de l'édifice de 65 à 48 m. Les coins de l'immeuble ont été arrondis et ses façades placées en retrait, à plus de 9 m de la rue. Sa mise en chantier nécessitera néanmoins des modifications au plan d'urbanisme, tant sur la densité (on passerait de 6 à 7,7) que sur la hauteur permise (de 25 à 48 m).

Les résistances

Malgré ces belles promesses, le Quadrilatère Saint-Laurent est loin de faire l'unanimité. Ce coin de rue unique et historique, lieu de transit de plusieurs générations d'immigrants et ancien coeur du Red Light de Montréal, s'avère particulièrement sensible. Selon la Ville, certains immeubles des années 1880 auraient une valeur exceptionnelle... Mais les études patrimoniales de la SDÀ disent le contraire. Le promoteur prévoit démolir une dizaine d'édifices pour concrétiser son projet. Il promet en revanche de conserver les façades et de les intégrer au futur bâtiment, un compromis qui est loin de contenter les architectes et les tenants du patrimoine qui se sont prononcés sur la question.

Plusieurs s'inquiètent en outre de cette tour à bureaux de 300 000 pi2 qui surplombera l'un des coins de rue les plus animés et mythiques de la ville. Dévisagera-t-elle le quartier? Perturbera-t-elle son «écosystème» unique? Sa vie nocturne? Quelles seront les conséquences au chapitre de l'ensoleillement? Du vent? L'organisme Culture Montréal estime que le projet va «à l'encontre de ce qui devrait être l'un des principaux objectifs pour le Secteur, i.e. l'augmentation de la fréquentation piétonne sur le boulevard Saint-Laurent et la rue Sainte-Catherine.»

Enfin, trois commerçants - toujours actifs sur la Main - refusent de vendre leur immeuble. Faute d'une entente de gré à gré, la Ville pourrait envisager leur expropriation. Une pétition circule en ce moment sur le web pour la sauvegarde du Cabaret Cléopâtre.

Les perspectives

L'Office de consultation publique doit remettre son rapport au plus tard début août. La suite du projet dépendra de ses recommandations. À noter que, à la toute fin du processus, le ministère de la Culture aura aussi son mot à dire puisque le Quadrilatère se situe dans l'aire de protection du Monument-National, classé patrimonial par le gouvernement provincial.

Plusieurs centaines de citoyens ont participé à une ou l'autre des cinq soirées d'information organisées par l'Office durant le mois de mai, qui ont déposé une cinquantaine de mémoires disponibles sur le site Internet de l'Office: www.ocpm.qc.ca.