Les riverains de La Prairie sont exaspérés de la pollution sonore engendrée par la réfection du tronçon de l'autoroute 15-132 qui longe leur municipalité. Un groupe de citoyens qui se bat depuis six ans pour obtenir des mesures correctrices songe à intenter un recours collectif contre le gouvernement.

Les problèmes des citoyens débutent en 2004 lorsque le ministère des Transports du Québec (MTQ) remplace l'asphalte de l'autoroute 15-132 par du béton strié. Selon plusieurs témoignages, la pose de ce nouveau type de recouvrement, conjuguée à l'augmentation de la circulation et à l'ajout d'un angle dans la chaussée, a rendu la pratique d'activités à l'extérieur désagréable, voire impossible. Le bruit des voitures auquel ils étaient habitués se serait transformé en sifflement strident et permanent.

«Il faut crier pour s'entendre parler, explique Sohel Zarrifa, membre du groupe des citoyens. Les gens se réfugient à l'intérieur et n'utilisent plus leur cour. Nos propriétés ont perdu de la valeur.»

«Le bruit de la circulation était tolérable avant les travaux, ajoute un autre résidant, Michel Gauthier. Aujourd'hui, il suffit de peu pour nous réveiller la nuit.»

Contestation massive

Peu après les travaux, 250 citoyens se mobilisent pour demander au MTQ et à la mairie de La Prairie de financer des mesures atténuantes. Un comité tripartite est mis sur pied pour faire avancer le dossier, avec peu de résultats concrets.

Avec les années, plusieurs solutions ont été proposées. Le ministère a notamment suggéré de construire des murs antibruit. Le ministère de la Culture du Québec a toutefois refusé que de tels murs soient érigés devant les 2,5 kilomètres de l'autoroute qui bordent l'arrondissement historique.

De son côté, la mairesse de La Prairie, Lucie Roussel, affirme que la municipalité n'a pas l'argent nécessaire pour payer la moitié des coûts de la construction de murs devant les trois autres secteurs touchés. Ces coûts s'élèveraient environ à 17 millions de dollars.

Le ras-le-bol des citoyens est aujourd'hui à son comble. À l'instar d'un groupe de citoyens de la région de Québec, qui a déposé une requête en recours collectif contre le MTQ qui pourrait atteindre 30 millions de dollars, il y a deux semaines, les habitants de La Prairie pensent maintenant emprunter la voie judiciaire.

«Nous avons utilisé tous les moyens de persuasion douce, précise Michel Gauthier. Nous avons droit à une qualité de vie. On en est rendus là.»

La politique ministérielle sur le bruit indique que les secteurs résidentiels où le bruit ambiant moyen durant 24 heures atteint ou dépasse 65 décibels peuvent bénéficier de mesures atténuantes. Cette politique n'a toutefois pas force de loi. Cette limite est souvent dépassée lors des heures de pointe, soutiennent les sept citoyens rencontrés par La Presse.

Étude à l'appui, Sohel Zarrifa soutient également que le revêtement en béton est entre 6 et 10 décibels plus bruyant que le revêtement bitumineux.

Interrogé à ce sujet, le MTQ a réfuté cette information. «Nos études démontrent que l'asphaltage n'entraîne pas une diminution significative du bruit pour l'ouïe», a expliqué Geneviève Jutra, agente d'information à la direction de la Montérégie Ouest du MTQ. «Le ministère connaît le problème, ajoute-t-elle. Nous sommes en discussion avec la Ville de La Prairie pour trouver la meilleure solution au meilleur coût possible.»

Installer des buttes végétales qui ne cacheraient pas le fleuve, comme le proposent les citoyens, est également écarté, dit-elle, «car on est restreint dans la grandeur des terrains».

L'asphaltage de la 15-132 coûterait environ 3 millions de dollars, disent les citoyens qui gardent espoir que la situation se résorbe.

«Nous voulons un dénouement comme à Sainte-Thérèse, dit Michel Gauthier. Là-bas, ils sont parvenus à convaincre le MTQ de poser de l'asphalte sur le ciment et ont obtenu des murs végétaux comme on le réclame depuis le début.»