Benoît Labonté, chef de l'opposition officielle de la Ville de Montréal et maire de l'arrondissement de Ville-Marie, demande au gouvernement du Québec d'adopter un décret pour éviter la tenue d'une deuxième ronde de négociations publiques sur le projet de CHUM au centre-ville.

« Les citoyens de Montréal sont prêts à ce que nous fassions avancer cet important dossier, a-t-il déclaré ce matin. Il faut passer aux gestes concrets maintenant. Tout reprendre depuis le début allongerait inutilement les délais et les coûts et risquerait peut-être de menacer le projet. » En vertu de la Charte de Montréal, les gros projets, comme les hôpitaux, doivent faire l'objet de consultations publiques. En mai dernier, après un processus de consultations de 19 mois, le conseil municipal de la Ville a adopté un règlement de zonage, qui fixe des balises au projet de Centre hospitalier de l'Université de Montréal.

Mais depuis, le projet a changé de façon radicale. L'hôpital Saint-Luc sera démoli; la hauteur du nouveau bâtiment sera augmentée de 80 à 85 mètres; le nombre de places de stationnement est appelé à doubler. Toujours en vertu de la Charte, il devrait y avoir de nouvelles consultations.

Jusqu'à maintenant, le gouvernement a dit qu'il n'adopterait pas de décret pour permettre à la Ville de modifier son règlement de zonage sans faire de consultations. Mais depuis quelques jours, il ouvre la porte à une telle possibilité. Marie-Ève Bédard, attachée de presse du ministre de la Santé Yves Bolduc, dit en effet que la porte n'est pas complètement fermée, bien que ce ne soit pas là le premier choix du gouvernement.

« L'Office de consultation publique de Montréal a reçu 34 mémoires et plus de 400 personnes se sont prononcées, en 2006, sur ce projet, a dit ce matin M. Labonté. Il y a déjà eu beaucoup de débats et de représentations sur ce projet. Professionnels de la santé, citoyens et groupes communautaires ont amplement eu l'occasion de donner leur avis sur l'intégration du futur CHUM au centre-ville : séances d'information, ateliers, auditions publiques, dépôts de mémoires, témoignages, rapports.

« Dans un contexte où beaucoup de projets ne démarrent pas ou stagnent à Montréal, nous devons agir avec responsabilité. Si cela implique que les élus de l'opposition doivent déléguer au gouvernement provincial le pouvoir de débloquer rapidement le projet et d'éviter tout report inutile et coûteux, alors cela est notre position et nous sommes convaincus que cela devrait également être la position de la Ville de Montréal. »

L'appel à un décret tranche avec la position prise par le chef du deuxième parti d'opposition à l'Hôtel de Ville, Richard Bergeron. Vendredi, M. Bergeron a écrit au premier ministre Jean Charest pour lui demander de respecter le processus démocratique à la Ville, et de ne pas le court-circuiter avec un décret. Selon lui, cette nouvelle ronde de consultations publiques offre l'occasion de remettre en question le mode de construction choisi par le gouvernement, soit le partenariat public-privé.

« Le contexte économique a complètement changé depuis la décision de construire le CHUM en PPP, il y a trois ans, a-t-il dit lundi. Les consortiums privés peinent à obtenir du crédit, en raison de la crise financière, et doivent payer des taux d'intérêts élevés. »

Deux consortiums ont été qualifiés pour construire le CHUM en PPP. Le premier est dirigé par le groupe d'ingénieurs Axor et la société britannique Innisfree. Le second était dirigé par la société espagnole Acciona et le groupe australien Babcock & Brown. Ce dernier groupe, au bord de la faillite, a dû se retirer et n'a pas été remplacé.

La semaine dernière, le président de l'Agence des PPP, Pierre Lefebvre, a dit à La Presse que la société restante - Acciona - avait les reins assez solides pour fonctionner sans partenaire. Or, L'Acadie Nouvelle vient de révéler qu'Acciona est incapable de trouver le financement pour un projet d'éoliennes en PPP au Nouveau-Brunswick, si bien que ce projet est mis sur la glace.