Depuis quelques années, les suicides qui surviennent dans les métros sont protégés par la loi du silence. Certaines villes songent toutefois à franchir les limites de ce sujet délicat.

Dans un dossier publié il y a quelques semaines, le journal français Libération a écrit que le tabou entourant les suicides sur les rails pourrait disparaître. Une hausse des suicides enregistrée sur le réseau de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) motive l'entreprise ferroviaire à briser le silence entourant ce fléau.

 

«La montée des suicides nous inquiète. Un suicide, c'est une à trois heures d'interruption totale sur la ligne. On ne peut plus dissimuler ces événements et se contenter de parler d'«accidents de personne». Il faut dire la vérité», a expliqué il y a quelques jours Guillaume Pepy, président de la SNCF.

En 2008, 181 personnes ont tenté de se suicider sur le réseau français, contre 148 en 2007. C'est presque un cas tous les deux jours.

De son côté, Michel Tousignant, chercheur à l'UQAM, demeure convaincu que le suicide dans le métro, un événement public, ne doit pas être caché. «Des centaines de personnes peuvent le voir et le raconter. C'est différent de quelqu'un qui se pend dans son sous-sol», souligne le professeur.

Quant aux risques d'un effet d'entraînement, ils touchent une infime partie de la population. «Ce sont des gens malades en profonde détresse psychologique», explique le professeur.

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L'impact Girouard

Le professeur Michel Tousignant a commencé à s'intéresser à la médiatisation du suicide et à ses effets pervers dans les années 90, lorsqu'une école secondaire de Coaticook a été frappée par cinq suicides en autant de semaines. 

Le chercheur a par la suite travaillé sur les nombreux dommages collatéraux qui ont suivi le suicide du journaliste Gaétan Girouard en 1999.

Au total, 200 suicides de plus que les années précédentes avaient été enregistrés, dont au moins une cinquantaine directement liée au battage médiatique qui avait entouré l'affaire. «Il s'était pendu avec une ceinture dans sa maison de Sainte-Foy. Les jours suivants, cinq ou six personnes s'étaient suicidées de la même façon dans la même ville», raconte Michel Tousignant, qui juge risqué de diffuser la méthode employée pour en finir.

Cette médiatisation a eu pour effet de glorifier la mort de l'animateur de télévision, ajoute son collègue Brian Mishara. «Il a fallu attendre six mois avant d'évoquer sa dépression», note-t-il.