Les Forces armées canadiennes élargissent leur mandat d’intervention au Québec au-delà de l’urgence pour participer au rétablissement pendant que les ravages de la crue historique de 2019 se font de plus en plus sentir vers le nord, notamment dans le Pontiac et au Témiscamingue, comme il était prévisible.

La ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a annoncé lundi à Montréal que les militaires demeureront pour continuer d’épauler leurs concitoyens pour la dure tâche qui les attend une fois que l’eau se sera retirée.

Les militaires pourront ainsi assister les autorités locales pour le ramassage de sacs de sable et autres remparts, mais aussi pour la remise en état de stations de pompage et d’usines de traitement des eaux.

La brigadier-général Jennie Carignan, qui était aux côtés de la ministre pour l’annonce, a précisé que ses troupes se concentreront sur les endroits où leur aide sera la plus utile.

« On va (se concentrer) beaucoup sur les municipalités ou les communautés qui ont moins de moyens parce que certaines municipalités n’ont pas tous les moyens qu’ont les grosses villes, donc les communautés qui sont plus vulnérables vont être servies en premier », a-t-elle précisé.

Crainte de glissement de terrain à Notre-Dame-du-Nord

Pendant ce temps, la fonte des neiges continue de remplir les réservoirs et autres plans d’eau vers les régions nordiques des bassins versants et la municipalité de Notre-Dame-du-Nord, sur la pointe nord du grand lac Témiscamingue, voit une portion de la rue principale être menacée par de possibles glissements de terrain le long de la rivière des Outaouais, là où elle se jette dans le lac.

« Notre grosse crainte, c’est qu’on a plusieurs secteurs à risque d’éboulement dans ce secteur. On a peur que les berges se fassent gruger », a confié le maire Nico Gervais en entrevue avec La Presse canadienne.

Le village d’un peu plus de 1000 habitants est pris en souricière entre le lac et trois barrages successifs d’Hydro-Québec qui turbinent l’eau le long de la rivière des Outaouais en amont. Ces barrages ne peuvent retenir davantage d’eau.

L’immense lac Témiscamingue, de son côté, n’arrive pas à se vider assez vite malgré l’ouverture à plein du complexe de barrages à sa pointe sud.

Le maire Gervais a précisé que le premier barrage en amont, celui de la Première-Chute, qui n’est qu’à deux kilomètres du village, a atteint un débit jamais vu de 1300 mètres cubes à la seconde.

« C’est sûr que le niveau de l’eau va monter. Il y a certains citoyens riverains qui ont pris des mesures d’urgence depuis mercredi passé. On a étendu au-delà de 18 000 sacs de sable. »

Évacuations préventives

Les prévisions font état d’une montée du niveau d’eau d’environ 15 centimètres d’ici trois jours, ce qui crée un très fort courant dans la rivière des Outaouais juste avant de se jeter dans le lac et c’est à cet endroit précis que les craintes de glissements de terrain sont les plus fortes.

La municipalité a déjà enjoint les résidants et commerces situés sur la portion de la rue Principale que l’on considère à risque de quitter les lieux préventivement.

« On a fait de la prévention. On est allé avertir tous les citoyens que ce serait préférable de quitter pour le temps de la crue des eaux et d’aller habiter chez des parents ou des amis ou au pire à l’hôtel », a expliqué le maire Gervais.

Pendant ce temps, ailleurs sur le territoire de la municipalité qui se trouve en bordure du lac, plus au sud, quelque 18 000 sacs de sable ont été déployés pour tenter de retenir la montée des eaux. Déjà, le maire Gervais indique qu’un peu moins d’une dizaine de résidences seront certainement affectées.

Les habitants de la municipalité ne sont pas des habitués de ce genre de situation, au contraire.

« Ça fait 45 ans que j’habite à Notre-Dame-du-Nord et ce n’est jamais arrivé, a confié Nico Gervais. Et j’ai parlé à des personnes âgées du village qui habitent ici depuis toujours et elles n’ont jamais rien vu de pareil non plus. »

Conséquences en aval

L’ouverture à plein des barrages du sud du lac Témiscamingue a évidemment eu un effet de cascade en aval.

Le secteur de Pembroke, en Ontario, est toujours aux prises avec des niveaux d’eau très élevés, mais la Commission de planification de la régularisation de la rivière des Outaouais a toutefois observé que les niveaux se stabilisaient.

Cependant, les niveaux ont continué de monter dans les secteurs du lac Coulonge jusqu’à celui du lac Deschênes, tout juste à l’ouest de Gatineau ; on s’attendait à ce qu’ils atteignent une pointe lundi.

À Gatineau, les niveaux d’eau de la rivière des Outaouais ont crû durant le week-end, mais sont demeurés sous les pointes signalées il y a une dizaine de jours.

Entre le secteur de Hull, à Gatineau, et la région de Hawkesbury, à une soixantaine de kilomètres à l’ouest de l’île de Montréal, les niveaux semblaient avoir atteint leur pointe. Le long de ce tronçon, ils devraient demeurer stables lundi pour ensuite descendre lentement.

Conséquemment, le nombre de secteurs en inondation majeure, qui avait chuté à deux vendredi, était remonté à cinq lundi, soit le lac des Deux Montagnes à Pointe-Calumet, la rivière des Outaouais à la marina de Hull, à la Baie Quesnel et à la Baie de Rigaud ainsi que la rivière Gatineau au pont du boulevard Fournier.

À Maniwaki, la hausse anticipée du niveau de la rivière Désert d’ici mercredi après-midi a incité le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais à évacuer lundi après-midi le Centre hospitalier de soins de longue durée (CHSLD) Foyer Père Guinard qui héberge près de 70 personnes. L’établissement est situé sur la rue des Oblats qui longe la rivière Désert, un affluent de la rivière Gatineau.