L'apôtre du tramway Richard Bergeron se réjouit de voir que le maire de Québec considère sérieusement ce mode de transport pour sa ville. Il exhorte Régis Labeaume à ne pas se contenter du « pis-aller » que représente le SRB.

« Kitchener, Waterloo et Cambridge inaugurent leur système de tram au printemps. Ottawa le fera l'année prochaine. Toronto a deux réseaux de tramway différents, énumère le fondateur de Projet Montréal en entrevue à La Presse. Finalement, tout l'Ontario va y passer et nous, on va encore être à faire des SRB. On est vraiment en retard. »

Contre toute attente, Régis Labeaume a laissé entendre jeudi que le système de transports en commun structurant qu'il a promis lors de la dernière campagne électorale municipale pourrait être un tramway. C'est une « hypothèse sérieuse », a lancé le maire, qui favorisait encore il y a quelques mois un projet de Service rapide par bus (SRB).

La veille, le nouveau ministre des Transports a déclaré en entrevue au quotidien Le Soleil que le gouvernement Couillard serait prêt à étudier un projet de tramway pour Québec. « Nous, on n'a pas de préjugé plus favorable pour un mode de transport ou un autre, déclarait André Fortin. On veut attendre de voir ce que le maire va mettre sur la table. »

OCCASION MANQUÉE

L'idée d'un tramway pour Québec n'est pas nouvelle. Richard Bergeron raconte que l'ancien maire Jean-Paul L'Allier l'avait fait venir dans la capitale en 2003. L'urbaniste et expert en mobilité devait s'adresser au comité exécutif pour vendre l'idée d'un tramway.

« Avant que je rentre dans la salle, M. L'Allier m'avait dit : "Vas-y Richard, un dernier petit coup de pouce, c'est tout ce qu'il manque." C'est vous dire comment on était proches. »

Un an plus tôt, ce partisan invétéré du tramway s'était rendu à Bordeaux en compagnie du maire de Québec. « M. L'Allier allait voir le maire Alain Juppé, qui était son ami, raconte Richard Bergeron. Le tramway était en construction là-bas à l'époque. Le maire s'était engagé à ce que M. Juppé vienne, pour le 400e de Québec, en 2008, inaugurer le tramway chez lui. »

Le projet ne s'est finalement jamais réalisé. Des années plus tard, Richard Bergeron a questionné Jean-Paul L'Allier. « Il m'a répondu simplement qu'il ne voulait pas laisser une dette de 1 milliard derrière lui. »

DE RETOUR SUR LA TABLE

Un rapport sur la mobilité durable commandé par Québec recommandait en 2010 d'instaurer un tramway dans la capitale. Régis Labeaume s'était alors montré ouvert. Mais le gouvernement de Pauline Marois voulait partager la facture.

« Est-ce qu'on a demandé à Montréal de payer la moitié du métro ? », demandait alors le maire de Québec. Sept ans plus tard, les ordres fédéral et provincial n'écartent pas l'idée de payer la facture.

Richard Bergeron exhorte M. Labeaume à sauter sur l'occasion. « C'est la technologie parfaite pour Québec. S'ils veulent le SRB, qu'ils se rabattent sur le SRB, mais c'est un pis-aller. Une ville de 650 000 habitants avec les banlieues rapprochées, c'est le format idéal pour un réseau de tramway », estime M. Bergeron, qui a été défait aux dernières élections alors qu'il portait les couleurs d'Équipe Coderre.

« Il n'y a que le tramway pour convaincre la population de Québec de l'utiliser sans regret, sans avoir l'impression de faire une concession, un sacrifice. Un tramway, c'est comme le métro. On ne se prive pas quand on prend le métro à Montréal, on ne le fait pas pour la planète, dit-il. On le fait parce que tout le monde aime le métro de Montréal. Le tramway aurait le même effet à Québec. »

Dans les dernières semaines, plusieurs ministres du gouvernement Couillard ont enjoint au maire Labeaume de déposer un projet de transports en commun. Le projet est en train d'être élaboré à la Ville, après des consultations tenues à l'automne.