L'enquête sur le vol de 29 plaques funéraires de bronze sur les tombes de certains défunts inhumés au cimetière des Résidences et jardins funéraires Bessette, à Granby, suit principalement la piste du recyclage de métaux.

Il ne fait aucun doute, en effet, qu'il s'agit d'un vulgaire vol de métal et non de vandalisme ou d'une attaque symbolique quelconque.

«Les voleurs ne peuvent pas en faire d'autre usage que de les revendre pour le métal. Des vols de métaux, on en a de temps en temps, mais dans un cimetière, c'est la première fois», a indiqué l'agente Caroline Garand de la police de Granby en entrevue avec La Presse Canadienne.

«Tous les métaux sont convoités par les voleurs», confirme le sergent Hugo Fournier, de la Sûreté du Québec, tout en précisant que les voleurs sont prêts à tout, quelle que soit la valeur de ce qu'ils convoitent. «Le marché n'est pas très haut, présentement, pour la revente du bronze», dit-il.

«Ça va leur rapporter à peu près 2,00 $ la livre sur le marché noir», estime Carl Jobin, président de la fonderie Métallurgie Syca de Saint-Dominique en Montérégie, précisant que le prix du lingot de bronze sur le marché légitime se situe entre 3,50 $ et 4,50 $ selon le type d'alliage requis par sa fonderie.

«Ils écoulent probablement ça dans des «cours à scrap» qui ramassent le métal, à moins qu'ils aient une petite fournaise et qu'ils le coulent eux-mêmes et qu'ils fassent des lingots», a-t-il indiqué, ajoutant que le marché noir n'est pas difficile à percer.

«Les recycleurs de métal, ce ne sont pas tous d'honnêtes gens. Mais pour un truc comme ça, il y en a probablement plusieurs qui vont carrément refuser», a dit M. Jobin.

La Presse Canadienne a joint trois entreprises de recyclage de métaux. Dans les trois cas, les interlocuteurs ont accepté de nous parler, mais sous couvert d'anonymat. Dans tous les cas, on nous a assuré que tout achat de métal donnait lieu à la demande d'une preuve d'identité qui était entrée aux livres.

Un recycleur de la Montérégie a cependant admis que des objets louches étaient régulièrement apportés à l'entreprise et que ce serait évident dans un cas comme celui-ci.

«Une plaque funéraire, les gars vont la couper en morceaux et grinder (passer à la meule) ce qui est marqué dessus, mais pour nous, ça paraît que c'est ça. Tu peux le refuser ou appeler la police», a dit ce recycleur anonyme.

«Des plaques funéraires, je ne prends pas ça, je vais les refuser, mais je n'appellerais pas nécessairement la police», nous a dit une acheteuse dans une entreprise de recyclage située dans les Laurentides.

Un autre recycleur des Laurentides a expliqué que les voleurs finiront par trouver preneur. «Ils essaient de passer ça quelque part. Ici je vais leur dire que je ne le prends pas, ils vont aller ailleurs, ils ne le prendront pas non plus, mais ils vont continuer jusqu'à ce qu'ils tombent sur quelqu'un qui a besoin d'argent et qui va l'acheter», a-t-il dit.

Carl Jobin, de Métallurgie Syca, estime que le vol leur rapportera en tout entre 2000 $ et 3000 $, selon le poids total, mais la somme n'a aucune importance, ajoute-t-il avec véhémence.

«Gang de dégueulasses», a-t-il laissé tomber, dégoûté. «Ils ont détruit un patrimoine. Ce sont des familles qui ont payé pour ça.»

Éric Bessette, directeur funéraire au cimetière, assure pendant ce temps que tout sera fait pour alléger la facture des familles touchées.

«Le monument appartient à la famille et c'est à eux de le remplacer. Mais on va trouver une solution; on ne veut pas qu'ils paient le même prix une deuxième fois», a-t-il dit.

N'empêche que la famille Bessette, qui oeuvre dans le domaine funéraire depuis plusieurs décennies et dont l'entreprise a près de 45 ans, est troublée par cette affaire inédite.

«On n'aurait jamais cru que ça pourrait arriver, que des gens soient capables de faire ça», a déclaré Éric Bessette en entrevue téléphonique.

Les vols auraient eu lieu entre le 20 avril, vers 21h00, et le 21 avril, vers 11h00, dans le cimetière, qui est situé dans un secteur plutôt isolé de Granby, sur la rue des Colombes.

Éric Bessette a indiqué que, dès le lendemain, l'entreprise avait institué une surveillance de nuit et d'autres mesures de sécurité.