Alors que Laval était sous tutelle l'année dernière, l'ex-maire Gilles Vaillancourt a fait le pied de grue dans le hall d'entrée de l'hôtel de ville pendant une heure et demie, en réclamant qu'on lui remette «ses effets personnels».

M. Vaillancourt est reparti les mains vides, mais sa visite a permis de découvrir 208 boîtes de documents dans la chaufferie de l'édifice et, avec celles-ci, des «éléments de preuve importants».

C'est le maire Marc Demers qui a raconté cette histoire, hier, alors que son administration a décidé de partir à la chasse aux millions de dollars détournés par collusion ou corruption. En intentant des poursuites civiles, Laval a dans sa ligne de mire des dizaines d'entreprises, de firmes et d'individus, dont l'ancien maire Gilles Vaillancourt.

Ce dernier avait caché des boîtes de documents avec la mention qu'elles appartenaient au maire. Une fois élu, Marc Demers a donc demandé un avis juridique qui a confirmé que les boîtes n'étaient pas la propriété d'un individu, mais plutôt liées à la fonction de maire.

Du coup, des firmes spécialisées ont été mandatées afin d'ouvrir les boîtes et de décortiquer les trésors d'information qui s'y trouvaient. «Il y a des éléments de preuve importants», a reconnu M. Demers, sans apporter de précision. «Cette situation met surtout en évidence l'ouverture d'esprit de nos employés qui voulaient collaborer», a-t-il ajouté.

L'administration Demers a mandaté l'avocat Daniel Chénard afin de lancer des procédures civiles visant à récupérer les sommes payées en trop au fil des dernières décennies. L'avocat s'appuiera sur des «preuves accablantes» provenant des boîtes de la chaufferie, mais également sur les témoignages entendus à la commission Charbonneau.

«Il est maintenant évident que plusieurs firmes, entrepreneurs et individus ont agi illégalement pour détourner l'argent des Lavallois. Le temps est venu pour eux de répondre de leurs actes et de rendre aux citoyens leur dû», a expliqué M. Demers.

De plus, le futur procès de M. Vaillancourt - accusé de gangstérisme, fraude et corruption - et de 35 (un accusé est mort) autres personnes dans l'enquête Honorer pourrait nourrir les procédures lavalloises.

Pour l'opposition officielle à l'hôtel de ville, ces démarches sont prématurées et risquent surtout de coûter très cher. «Pour les citoyens, c'est une opération rentable, soutient le maire Demers. Et pour le futur, le message est clair: la récréation est finie! Le vrai scandale, ç'aurait été de ne rien faire.»

Pour faciliter son travail de récupération des sommes détournées, Laval souhaite que le gouvernement du Québec étudie de nouveau le projet de loi 61, mort au feuilleton lors de la défaite du Parti québécois. Selon Marc Demers, cette avenue donnerait un coup de pouce aux villes contre les corrupteurs et les collusionnaires.

Par ailleurs, l'ancien directeur général de l'organisme Laval en fleurs, Mathieu Lavoie, a été reconnu coupable de fraude vendredi dernier. Du coup, ce verdict vient valider la démarche entreprise par la Ville pour récupérer l'argent détourné.