La résolution du conseil municipal de Mascouche qui a autorisé en 2007 l'entrepreneur Normand Trudel et sa firme TEM à confier à un sous-traitant le déneigement des bornes d'incendie a été entérinée par les conseillers sur la base de renseignements erronés, démontrent des documents obtenus par La Presse.

En conséquence, le contrat global de TEM, qui arrive à échéance en 2012, pourrait être rouvert dans les prochains jours à la demande de certains conseillers et peut-être résilié dans sa forme actuelle.

Ce contrat de déneigement accordé en 2007 à la firme de Normand Trudel n'en finit plus de faire des vagues. Nouveau rebondissement: TEM aurait confié le déneigement des bornes d'incendie à une autre entreprise avant d'obtenir l'accord de la Ville, ce qui est un motif de résiliation selon les termes du contrat.

Rappelons que, le 17 septembre 2007, la Ville de Mascouche a accepté la soumission de la firme de Normand Trudel pour le déneigement des rues, trottoirs et bornes d'incendie du secteur A de la ville de Mascouche. La valeur du contrat s'élève à 2,5 millions de dollars la première année, dont 401 500$ pour les bornes d'incendie (650$/borne/hiver). Dans sa soumission, la firme TEM assurait avoir tout l'équipement et le matériel nécessaires pour remplir cette tâche.

Mais le 29 novembre 2007, la secrétaire de la firme TEM écrit ceci au directeur général de la Ville de Mascouche: «Nous désirons vous informer que nous avons donné en sous-traitance le déneigement des bornes-fontaines à la compagnie Déneigement F.M. (...) Soyez assuré que le sous-traitant respectera les clauses du devis.»

Or, la clause 3.21.2 de ce devis prévoit comme «motif de résiliation» le fait que l'entrepreneur «confie en partie ou en entier, sans l'autorisation du conseil municipal, l'exécution de son contrat à un autre entrepreneur».

Lorsque le conseil se réunit le 3 décembre 2007, l'autorisation de la sous-traitance du contrat accordé initialement à TEM figure à l'ordre du jour. Deux des attendus de la résolution, proposée par Donald Mailly et adoptée à l'unanimité, sont libellés ainsi:

«Attendu que l'entrepreneur Transport et excavation Mascouche inc., dans sa correspondance du 27 novembre 2007, demandait à la Ville l'autorisation d'accorder une sous-traitance à l'entrepreneur Déneigement F.M. inc. pour le déneigement des bornes-fontaines; attendu qu'aux termes du devis (...), l'entrepreneur doit obtenir l'autorisation du conseil avant d'accorder une sous-traitance.»

Fait accompli?

Le libellé de cette résolution ne correspondrait donc pas à la réalité. Jamais dans la lettre du 27 novembre à laquelle la résolution fait référence TEM ne demande l'autorisation de sous-traiter. Les conseillers savaient-ils que TEM avait déjà confié à un tiers une partie de son contrat? Ont-ils vu la lettre avant de voter?

«Le conseil s'est soumis à la décision de l'entrepreneur, et non l'inverse», dit Stéphane Handfield, ex-candidat aux élections municipales.

Le conseiller Donald Mailly plaide la bonne foi: «Trois ans et demi plus tard, c'est peut-être l'impression que ça donne. Mais à l'époque, non. En tant que gestionnaires, on devait s'assurer qu'il n'y avait pas de coûts additionnels.» Mais il ne peut expliquer pourquoi le libellé de la lettre de TEM du 27 novembre ne correspond pas à ce qui est écrit dans la résolution.

«On est en droit de se demander, dit M. Handfield, si cette résolution n'est pas invalide et, par effet domino, le contrat en lui-même. Le conseiller Mailly et ses collègues se sont basés sur une information erronée pour voter. Est-ce que ça ne rend pas le processus vicié?»

«Je ne ferai pas de commentaires, réplique Donald Mailly. Quant à la résiliation du contrat global, je préfère obtenir l'opinion du greffier avant.»

Légalement, une résolution municipale peut être annulée par la Cour supérieure au moyen d'un recours en nullité (en invoquant le pouvoir de contrôle et de surveillance de la Cour supérieure) ou au moyen d'un recours en cassation (articles 352 et 397 de la Loi sur les cités et villes et article 689 du Code municipal). Mais il faut faire la preuve que cette résolution est viciée par une illégalité susceptible de la rendre nulle.

Quoi qu'il en soit, le conseiller indépendant Jacques Tremblay a l'intention de demander, aux réunions préparatoires du prochain conseil municipal, que ce contrat controversé du déneigement soit rouvert. Il souhaiterait même le scinder en deux ou trois pour réaliser des économies. «Il faut savoir ce qui s'est passé», dit-il en rappelant que, à cette époque, les dossiers étaient donnés aux conseillers à la dernière minute.

Au mois de janvier, La Presse avait invoqué la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir les documents concernant le contrat de déneigement accordé à l'entreprise Transport et excavation Mascouche, ainsi que toutes les lettres échangées entre la firme elle-même, et le maire ou des responsables de la municipalité. Tous les documents évoqués dans cet article n'ont jamais été envoyés à La Presse.

«On a considéré que ce n'était pas un document que vous recherchiez», a justifié Yvan Laberge, greffier.

Le ministère des Affaires municipales préfère ne pas faire de commentaires étant donné qu'une vérification est en cours à Mascouche. Celle-ci porte justement sur la gestion des contrats accordés, dont celui du déneigement.

Ni le cabinet du maire Marcotte ni Normand Trudel n'ont répondu à nos questions.

Avec William Leclerc