Québec veut éliminer les déficits récurrents dans les établissements de santé. Pour ce faire, il incitera les hôpitaux à «revenir à leur mission première», a appris La Presse. Une nouvelle équipe engagée par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) se rendra aussi dès janvier dans les établissements pour scruter leurs états financiers et les ramener dans le droit chemin.

Depuis 2004, les établissements de santé doivent respecter un «déficit autorisé». À Montréal, la quasi-totalité des hôpitaux présente année après année des dépassements de coûts importants. Le Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM) a enregistré un déficit de 12,6 millions l'an passé, l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, de 7,4 millions, et l'hôpital du Sacré-Coeur, de 5 millions.

À l'Agence de la santé et des services sociaux de Montréal (ASSS), la cible de dépassement budgétaire est de 55,8 millions par année. En 2008-2009, l'Agence a elle aussi cumulé un déficit de 61,8 millions.

Québec en a assez de ces déficits. Selon deux sources de La Presse, le gouvernement veut carrément durcir le ton avec les établissements de santé et analyser l'impact financier de chacune de leurs décisions.

«On veut maintenir les budgets, mais on veut améliorer le contrôle des dépenses», explique Marie-Ève Bédard, attachée de presse du ministre de la Santé, Yves Bolduc. Mme Bédard se défend de faire ainsi des «compressions déguisées». «Il n'y a pas lieu de sabrer. Mais il y a lieu de faire mieux avec les sommes investies», dit-elle.

Comment le gouvernement pourra-t-il éliminer les déficits des hôpitaux ? Il souhaite entre autres que la «mission première» des établissements soit respectée. Par exemple, un hôpital local qui faisait de l'orthopédie de pointe sans en avoir le mandat cessera d'offrir ce service et dirigera ses patients vers les centres hospitaliers universitaires (CHU). En revanche, les CHU seront invités à offrir moins de soins primaires.

«Les établissements doivent rapatrier leur clientèle. On leur dit : allez chercher votre clientèle, et les budgets suivront en conséquence», explique Mme Bédard.

Le MSSS assure que les services à la population ne seront pas touchés. «Il ne s'agit pas de compressions. C'est un mouvement des sommes investies», martèle Mme Bédard.

Le gouvernement compte aussi améliorer les performances des hôpitaux. «Certains ont déjà commencé à le faire. Par exemple, à l'hôpital Pierre-Boucher, on a changé les façons de faire au bloc opératoire pour traiter 15 cataractes par jour au lieu de 9», mentionne Mme Bédard.

Le MSSS ne s'est pas fixé de délai pour obliger les hôpitaux à ne plus faire de déficits. «Mais dans certains cas, la démarche pourra être plus longue, explique Mme Bédard. Quand on parle de changement de façons de faire, il faut prendre plus de temps.»

Plusieurs hôpitaux de la grande région de Montréal joints par La Presse mardi ont dit ignorer l'intention du gouvernement. «Nous ne sommes pas au courant», a dit la porte-parole du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM), Lucie Dufresne. Tous ont préféré attendre la confirmation du durcissement de ton de Québec avant de commenter.