Alors qu'aucun patient n'avait réussi à s'évader de l'institut Philippe-Pinel en plus de 20 ans, deux évasions ont eu lieu en moins d'une semaine, a appris La Presse.

Ces incidents préoccupent la direction du principal hôpital médico-légal au Québec au point où elle a décidé de renforcer ses mesures de sécurité.

Le second évadé est un adolescent récemment admis pour subir une évaluation psychiatrique à la demande de la cour, selon nos sources. Il s'est enfui dimanche dernier d'une façon similaire au premier. Il est toujours en cavale.

Le directeur général de l'hôpital, le Dr Jocelyn Aubut, a rappelé à ses employés d'être vigilants et de ne pas discuter devant les patients des méthodes qu'ont utilisées les fuyards pour s'échapper. De récentes rénovations aux fenêtres de l'hôpital pourraient avoir facilité leur évasion, a indiqué le Dr Aubut à La Presse. Dans les deux cas, les patients ont défoncé la nouvelle moustiquaire de la fenêtre de leur chambre.

Cet hôpital, qui accueille 291 patients jugés trop dangereux pour vivre en société, n'est pas une prison, même si plusieurs l'oublient souvent, rappelle le Dr Aubut. «Historiquement, on a décidé de ne pas blinder

l'endroit de manière ultra-sécuritaire parce que si on blinde le bâtiment à 100%, le seul moyen de sortir est une prise d'otage. Il faut garder le milieu humain pour que les patients ne se sentent pas en prison», explique le médecin.

Dès janvier, des mesures seront prises pour s'assurer que ce genre d'événement ne puisse pas se reproduire, assure-t-il. Déjà, tous les patients jugés «à risque» de s'évader ont été placés dans des chambres dont les fenêtres donnent sur des cours intérieures.

Contrairement à un pénitencier, le bâtiment n'est pas clôturé. Les employés chargés d'assurer la sécurité ne sont pas armés. Certaines chambres, dont celles des deux évadés, donnent sur un terrain vague. Toutefois, les fenêtres sont tellement étroites (15 cm de largeur) que nul n'aurait cru qu'une personne de taille moyenne pourrait s'y faufiler, a ajouté le Dr Aubut.

Comme dans un film

L'évasion du premier patient, Jean-François Lussier, 30 ans, survenue il y a une semaine, a été très médiatisée. Il était détenu depuis le 31 août dernier à la suite d'une série de crimes violents dont il n'a pas été tenu criminellement responsable pour cause de troubles mentaux.

Il a confectionné un mannequin pour le mettre dans son lit afin de tromper la vigilance du personnel. Durant la nuit, il a brisé la moustiquaire avec des outils de fortune, s'est glissé par la fenêtre et est descendu à l'aide de draps. La Sûreté du Québec (SQ), craignant qu'il récidive durant sa cavale, a lancé un avis de recherche. L'homme a été retrouvé deux jours plus tard à Joliette et a été ramené à l'institut Philippe-Pinel.

La direction avait alors qualifié l'incident d'«exceptionnel». Or, quatre jours plus tard, un adolescent a réussi à son tour à briser à coups de pieds la moustiquaire de la fenêtre de sa chambre, cette fois-ci en plein jour. Il s'est lui aussi servi de ses draps pour franchir la dizaine de mètres qui le séparaient du sol. La direction a également alerté la SQ, mais refuse de donner davantage de détails sur l'identité du fugitif pour des raisons de «secret professionnel».

Avant ces deux incidents, la plus récente tentative d'évasion remontait à plus de 20 ans, alors qu'un adolescent s'était brisé les deux jambes en sautant de la fenêtre de sa chambre, selon Dr Aubut. Le principal syndicat représentant les employés de l'institut Philippe-Pinel (SCFP, section locale 2960) a refusé de commenter les événements.