Avec 320 millions de dollars déjà engagés et seulement le tiers du travail réalisé, le Dossier santé Québec se cherche un sauveur.

Le ministère de la Santé vient de lancer une offre d'emploi pour trouver un «conseiller stratégique en redressement de projet» pour ce qui reste le plus important mandat informatique de tout le gouvernement du Québec.

 

À l'Assemblée nationale, hier, le critique péquiste en matière de Santé, Bernard Drainville, a ironisé devant les déclarations rassurantes du ministre Yves Bolduc, pour qui le projet, en dépit des retards importants qu'il accuse, est sur les rails: «Ça va-tu assez bien! On cherche un conseiller en redressement de projet! Cessez de prendre les Québécois pour des valises et dites-nous à quoi sert un conseiller en redressement si ça va si bien pour le DSQ!»

Le Dossier santé Québec visait à informatiser les dossiers des patients et à les rendre accessibles d'un établissement à l'autre. Le projet est, financièrement, puissamment appuyé par le gouvernement fédéral. Ottawa a toutefois récemment stoppé les nouveaux engagements tant il est clair que les projets ont dérapé dans les provinces. En Ontario, par exemple, le manque de direction dans l'informatisation a forcé la démission du ministre de la Santé.

Hier, le ministre Bolduc a répété que le projet «suit son cours». À l'automne, on a décidé de scinder le projet en quatre, conscient que l'on pourrait progresser seulement pour l'imagerie médicale et les prescriptions pharmaceutiques.

À l'origine, il y a trois ans, tout devait être terminé en juin 2010. Hier, le ministre Bolduc s'est limité à dire qu'un seul des quatre volets, celui de la radiologie, serait prêt à l'automne 2010.

«Le fait qu'on fasse des réajustements, c'est normal. C'est un dossier majeur», a soutenu M. Bolduc. «Les sommes dépensées l'ont été pour du travail qui a été effectué et nous sommes dans nos balises budgétaires», a insisté le ministre.

Au Québec, en 2006, le ministre Philippe Couillard avait confié ce mandat complexe au Dr André Simard, un consultant venu du privé. La Presse avait eu recours à la Loi sur l'accès à l'information pour connaître les conditions d'embauche de M. Simard. Le ministère de la Santé avait répondu qu'il fallait s'adresser à l'Agence de santé de Montréal. Or, les documents que le même ministère a fournis à la Commission parlementaire sur la santé indiquent que M. Simard a reçu 925 000$ de fonds publics depuis 2006. Il a toujours un contrat avec le Ministère, un mandat de 299 000$. Or, en octobre, le sous-ministre adjoint recruté pour ce dossier précis, Bernard Lefrançois, a annoncé au réseau qu'il était désormais «le pilote dans l'avion» de ce projet délicat.

Le Vérificateur général a depuis longtemps le Dossier santé Québec dans sa ligne de mire. Il avait critiqué vertement la décision de Québec de n'ouvrir qu'une seule soumission avant d'allouer un contrat de 120 millions de dollars à Bell Xwaves. Les autres soumissionnaires avaient été disqualifiés pour des raisons techniques. Comme le Ministère ne pouvait ouvrir qu'une seule soumission, le contrat avait dû être alloué par la régie régionale de Montréal.

Hier, le député Drainville a relevé que M. Simard n'est pas le seul à avoir profité du projet du DSQ. D'autres «consultants» en informatique ont bénéficié de mandats de 180 000$ à 273 000$.