Un an de salaire en cadeau de retraite. Trop beau pour être vrai? C'est pourtant le régime dont bénéficient les cadres du réseau de la santé au Québec.

Ainsi, dès l'âge de 55 ans, les cadres du ministère d'Yves Bolduc qui démissionnent avant d'avoir atteint le seuil de la retraite ont droit à une indemnité pouvant atteindre un an de salaire. Une situation qui agace depuis plusieurs années le Conseil du Trésor. Et pour cause.  Près de 80% des cadres du réseau de la santé partent à quelques mois de la date normale de leur retraite. L'indemnité de départ est si alléchante qu'il est devenu presque automatique qu'ils démissionnent avant leur retraite.

Dans l'actuelle ronde de négociations, le Conseil du Trésor menace d'abolir cette disposition l'an prochain. Les représentants des cadres ont tenté de la troquer contre le déplafonnement de leur régime de retraite, ce que Québec a refusé.

Conséquence: bon nombre des 600 cadres - directeurs, directeurs adjoints et conseillers cadres (d'anciens patrons mis sur une tablette) du réseau de la santé «ont la main sur la poignée de porte et se préparent à partir avant que cette indemnité soit abolie», confie une source dans le réseau. Cette généreuse indemnité n'a guère d'équivalent dans le secteur privé et reste unique dans le secteur public.

Interrogé en juin par La Presse, le ministre de la Santé, Yves Bolduc, avait dit ne pas connaître le coût de cette mesure. Un recours à la Loi sur l'accès à l'information a cependant forcé son ministère à fournir des chiffres.

Cette disposition a coûté près de 3 millions de dollars en fonds publics en 2007-2008, la dernière année pour laquelle on a des statistiques. Depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement Charest, les coûts de cette indemnité ont augmenté de plus de 25%.

Liberté 55

Le Ministère a analysé le départ de 124 cadres, directeurs de tous niveaux dans les hôpitaux, les CLSC, les agences régionales ou le Ministère. Pour bénéficier de l'indemnité - deux mois de salaire par année de service -, ces employés doivent avoir au moins 55 ans et compter 15 années de service dans le secteur public ou parapublic.

Le constat est embarrassant pour Québec: des 124 cas, 97 sont partis avant d'avoir atteint 35 ans de service - au-delà de 35 ans, on ne peut plus cotiser à sa caisse de retraite. De plus, pas moins de 80 cadres sont partis avant leur dernière année normale de travail. Le nombre de cadres qui ont opté pour la retraite a fait un bond important, passant de 33 en 2005 à 60 en 2006.

Hier, le ministre Bolduc a expliqué que ces dispositions «font partie d'ententes conventionnées» avec les associations représentant ces cadres.

Cela semble particulier au ministère de la Santé, «mais dans le réseau de l'Éducation, je suis convaincu qu'ils ont aussi des clauses particulières», a-t-il résumé.

Au Conseil du Trésor, où l'on administre ces indemnités de départ, l'agacement dure depuis bien longtemps. Pour les syndiqués, le gouvernement serre la vis depuis des années et ne remplace désormais qu'un seul employé pour deux qui s'en vont.

- Avec la collaboration de William Leclerc