Sylvain Villiard, qui pilote depuis des années le projet de nouveau CHUM au centre-ville de Montréal, a quitté ses fonctions la semaine dernière sur recommandation de son médecin, qui lui a suggéré de prendre un congé de maladie, a appris La Presse hier. Si son absence se prolongeait, elle illustrerait la crise qui ne cesse d'entourer le projet du nouveau centre hospitalier.

Un nouvel exemple: de nouvelles esquisses ont été dessinées et présentées à la Ville de Montréal ce mois-ci. Elles ont causé une grande surprise. Le bâtiment projeté est très volumineux, sinon monstrueux. Cela contredit le consensus obtenu lors des consultations publiques sur le nouveau CHUM et pourrait obliger la Ville à rejeter le projet, ce qui provoquerait de nouveaux retards.

 

Par ailleurs, comme La Presse l'a révélé la semaine dernière, la société australienne Babcock and Brown, acteur important dans le projet de partenariat public-privé (PPP) du CHUM, vit actuellement des difficultés financières majeures.

À un point tel que ses actions ont été suspendues en Bourse. Cette situation précaire remet en question la viabilité du projet.

La porte-parole du CHUM, Lucie Dufresne, n'a donné aucun détail sur la maladie de M. Villiard.

«Il est parti le mercredi 21 janvier, a-t-elle dit. Il est en arrêt de travail, prescrit par son médecin.» Impossible de savoir si la maladie est grave ou bénigne, si l'absence sera longue ou courte. Quoi qu'il en soit, cette absence survient à un bien mauvais moment.

En tant que directeur général adjoint du CHUM centre-ville, M. Villiard a un rôle important à jouer dans l'appel de propositions pour choisir le consortium qui construira le nouvel hôpital. Cet appel devait se faire l'automne dernier. Il a été reporté, mais il n'a toujours pas été lancé. De nombreux signes montrent que le projet traverse de sérieuses difficultés.

M. Villiard est le haut fonctionnaire qui a consacré le plus de temps et d'énergie à l'implantation du nouveau centre hospitalier de l'Université de Montréal, d'abord au 6000, rue Saint-Denis, puis à l'emplacement de l'actuel hôpital Saint-Luc. Il y a quatre ans, alors que le débat faisait rage, il s'était opposé à la construction du CHUM dans la gare de triage d'Outremont, entre des voies ferrées où circulent chaque année des milliers de wagons chargés de matières dangereuses, sur un terrain qui posait de sérieux problèmes d'accès en automobile ou par les transports en commun.

Appuyé par son patron, le Dr Denis Roy, directeur général du CHUM, il avait cité des études montrant que les coûts seraient beaucoup plus élevés à Outremont qu'au centre-ville. Cela lui avait valu les foudres de Robert Lacroix, alors recteur de l'Université de Montréal et chaud défenseur du choix d'Outremont.

Les arguments de M. Villiard, repris par l'ancien premier ministre Daniel Johnson et d'autres personnalités, avaient eu gain de cause et amené le gouvernement Charest à trancher en faveur du centre-ville, mais bien à contrecoeur. Les partisans d'Outremont n'ont jamais déclaré forfait.

Les principaux défenseurs du CHUM au centre-ville ne sont plus en poste, à commencer par l'ex-ministre de la Santé, Philippe Couillard, qui a démissionné en juin. Lorsque Yves Bolduc a été nommé pour lui succéder, un de ses premiers gestes a consisté à téléphoner au Dr Denis Roy pour lui annoncer qu'il souhaitait sa démission.

Ne bénéficiant plus de l'appui du ministre, le Dr Roy n'a pas eu d'autre issue que d'annoncer sa démission au conseil d'administration de l'hôpital. Six mois plus tard, son successeur n'est toujours pas nommé et ne le sera vraisemblablement pas avant la fin de l'hiver. Plus tôt, en 2008, un autre haut fonctionnaire qui travaillait au projet du CHUM au centre-ville, Mario Larivière, directeur du secteur immobilier au centre hospitalier, avait pris sa retraite.

Maintenant, selon des rumeurs provenant de trois sources, le président du conseil d'administration du CHUM, Me Patrick Molinari, pourrait quitter ses fonctions. Il a été impossible de lui parler hier. La responsable des communications du CHUM, Lucie Dufresne, a dit qu'elle n'avait jamais entendu parler de cet éventuel départ.