Ce ne sera pas la hausse prévue par le gouvernement Charest, mais le tarif du «bloc patrimonial» d'Hydro-Québec sera «dégelé». Le gouvernement Marois fera en sorte que le prix de l'électricité soit indexé à compter de 2014. De plus, encore une fois malgré des engagements du Parti québécois (PQ) en campagne électorale, le Fonds des générations sera maintenu.

Selon ce qu'a appris La Presse, le budget que dépose aujourd'hui Nicolas Marceau doit, pour demeurer acceptable aux yeux des agences d'évaluation du crédit, tabler sur une croissance sûre des recettes pour les prochaines années afin de réduire la dette au rythme prévu. Le dégel des tarifs patrimoniaux devenait un élément incontournable, en dépit des engagements de la campagne électorale.

Il y a deux ans, le budget de Raymond Bachand avait annoncé une hausse subite et importante de 30%, une augmentation de 1 cent du tarif préférentiel que paient les Québécois en compensation de l'investissement public nécessaire à la construction des grandes centrales dans les années 60. Ce bloc de 165 térawattheures était gelé à 2,79 cents le kilowattheure (au lieu de sa valeur réelle, établie à 5 cents). En haussant ce tarif de 1 cent, on faisait grimper d'un coup les recettes du gouvernement de 1,6 milliard entre 2014 et 2018.

En campagne électorale, le 20 août, Nicolas Marceau a soutenu catégoriquement qu'un gouvernement péquiste ne hausserait pas ces tarifs préférentiels. À l'Assemblée nationale, une fois élue, Pauline Marois a été bien plus évasive en promettant de «revoir la décision de l'ancien gouvernement de hausser d'environ 30% le prix de l'électricité patrimoniale sur cinq ans». La proposition du gouvernement Charest entraînait une hausse annuelle de 317$ par famille; la bouchée sera moins grosse à avaler avec la formule qu'annoncera aujourd'hui Nicolas Marceau.

Un «très gros effort» déjà fait

Hier matin, lors de la traditionnelle prise de photo du ministre des Finances chaussé de souliers neufs à la veille du dépôt de son budget, M. Marceau est resté évasif sur les promesses de la campagne électorale. Il a laissé entendre que certaines seraient reportées. «On fait des choix, on ne peut pas tout faire dans la même année, on en réalise beaucoup. Avec le temps, on parviendra à faire tout ce qu'on s'était engagés à faire.

«On a toujours dit qu'on avait un mandat devant nous. On va prendre le temps qu'il faut», a-t-il ajouté.

Le budget couvrira l'année 2013-2014, celle du déficit zéro. «L'année qui vient est la plus difficile, celle où on atteint l'équilibre budgétaire pour la première fois. C'est une année qui exige des efforts importants. On y arrive de façon très équilibrée», a dit le ministre.

Les contribuables, a-t-il reconnu, ont déjà largement participé à l'assainissement des finances publiques. «Tout le monde doit faire son effort. Les contribuables ont déjà fait un très gros effort. Dans le cadre du retour à l'équilibre budgétaire, les contribuables ont eu à subir des hausses importantes de taxes et de tarifs», a soutenu M. Marceau, qui a promis «une approche équilibrée» dans son budget d'aujourd'hui.

En plus de l'indexation du «bloc patrimonial», le gouvernement Marois prendra ses distances d'un autre engagement du PQ en campagne électorale. Le Fonds des générations, destiné à rembourser la dette pour donner de l'oxygène aux générations futures, ne sera pas aboli, comme on l'avait annoncé en campagne.

Québec conservera cette structure qui, par sa seule existence, force les gouvernements à s'occuper de la dette, mais il fera des versements plus régulièrement pour réduire la dette de 180 milliards. Le fonds dispose actuellement de 5,5 milliards. Le maintien du fonds sera un puissant argument pour amadouer l'opposition libérale - l'ex-ministre Raymond Bachand faisait de cette décision une condition sine qua non pour que les libéraux jugent à tout le moins recevable le budget Marceau.

Infrastructures: un vaste «réexamen»

Selon ce qu'a appris La Presse, le gouvernement annoncera aujourd'hui un réexamen général de bon nombre de projets d'infrastructures. Déjà, la semaine dernière, on a préparé les esprits avec une étude de Secor-KPMG qui montre que 5 des 44 milliards de projets annoncés sur cinq ans n'étaient même pas budgetés.

On donnera un tour de vis supplémentaire aujourd'hui en annonçant que le Conseil du Trésor réévaluera tous les projets d'infrastructures dont les travaux n'ont pas commencé. À partir d'un certain seuil, le dossier devra même être avalisé par le Conseil des ministres.

Le budget sera accompagné des crédits budgétaires du gouvernement - les présidents d'organisme ont déjà été prévenus que l'étude en commission parlementaire débuterait dès janvier 2013.

Le budget de la Santé sera augmenté de 5%, ce qui ne sera pas suffisant pour faire taire l'insatisfaction dans le réseau. Déjà, l'an dernier, en dépit d'une hausse de 5%, l'augmentation du coût réel des salaires et des médicaments ainsi que le vieillissement de la population ont forcé les établissements à pratiquer des compressions de 240 millions, fait-on savoir. L'éducation aura 2% de croissance - la hausse moyenne des ministères. Toutefois, l'an dernier, le réseau primaire et secondaire a tout de même dû subir des compressions de 150 millions malgré une augmentation de 2,6%.