Accusé jour après jour par le PQ de favoritisme à l'égard de donateurs libéraux, le ministre de la Famille, Tony Tomassi, est maintenant contredit par une association de garderies dans l'affaire des places attribuées en 2008.

Le 2 décembre, M. Tomassi avait promis de donner aux associations de garderies les rapports d'évaluation de chaque projet soumis cette année-là «pour dissiper tout doute» sur l'attribution des places. Or, les documents remis ne précisaient ni le nom de la garderie, ni celui du promoteur, ni la municipalité concernée. Et ils ne pouvaient être consultés que dans les bureaux du Ministère, pendant une heure.

«Le document ne contenait que des notes. Les noms des projets avaient disparu, comme par magie», a révélé à l'Assemblée nationale, hier, le député péquiste Nicolas Girard. «Est-ce que le ministre de la Famille est en train d'inventer un nouveau concept : la reddition de comptes à l'aveugle?»

Tony Tomassi a dit avoir respecté son engagement. «Nous avons démontré aux associations, hors de tout doute, que le processus qui avait été établi par le Ministère a été respecté. Les associations ont été satisfaites des rencontres», a-t-il affirmé en Chambre.

Des documents incomplets

Or, l'Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE) contredit le ministre. «On n'est ni ravis ni satisfaits. On leur a dit que c'était une procédure inappropriée», a dit son directeur général, Jean Robitaille, en entrevue à La Presse.

Il a raconté le déroulement de la rencontre survenue à la mi-décembre. «Le Ministère nous a soumis une pile de 30 cm de papiers avec des tableaux où il n'y avait aucun nom. C'était des colonnes avec des cotes, des lettres. On nous donnait une heure pour regarder ça. On ne pouvait pas partir avec les documents. Alors, on a refusé de participer à cet exercice qui ne nous permettait pas de porter un jugement.»

Contrairement à ce qu'a dit le ministre, l'AQCPE estime qu'«un doute a été soulevé» au sujet du processus d'attribution des places et que le Ministère n'a encore rien fait pour le dissiper. Elle demande que les rapports d'évaluation complets soient transmis aux médias, ce que refuse M. Tomassi.

Son ministère a également rejeté deux demandes du PQ faites en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. «Les efforts pour garder ce système-là confidentiel se poursuivent», a dit Nicolas Girard, se demandant s'il y a eu «ingérence politique» dans cette affaire. «Quand on n'a rien à se reprocher, on n'a pas peur de faire preuve de transparence. Alors, qui le ministre de la Famille veut-il protéger : lui-même, l'ex-ministre de la Famille, ou les deux?»

Dans la réponse envoyée au PQ, le Ministère explique que les documents demandés «sont formés, en substance, soit de renseignements financiers, commerciaux ou techniques fournis par des tiers, soit d'avis faits par des membres du personnel dans l'exercice de leurs fonctions. Leur divulgation aurait pour effet de révéler des projets de transaction relatifs à des services et pourrait vraisemblablement causer un préjudice sérieux aux tiers ou procurer un avantage indu à une autre personne.»

Les chiffres du PQ

Selon des recherches qu'a menées le PQ, 1600 places ont été accordées à 32 garderies privées, dont les administrateurs ont versé 112 000 $ au PLQ depuis 2003. Certains ont contribué pour la première fois au PLQ en 2008, au moment même où ils ont obtenu de nouvelles places. Mercredi, Nicolas Girard avait révélé que 400 de ces 1600 places ont été accordées à des «donateurs, organisateurs ou proches du ministre» qui résident dans LaFontaine - la circonscription de M. Tomassi - et dont les projets avaient obtenu de mauvaises notes.

Il en a remis hier, affirmant que 700 des 1600 places ont été attribuées à des donateurs qui résident dans quatre circonscriptions de Laval - la région dont l'ex-ministre de la Famille Michelle Courchesne est responsable - et surtout dans Fabre - la circonscription de Mme Courchesne.

La réplique de Tomassi

Tony Tomassi a fait valoir que 85% des propriétaires de garderies privées qui ont obtenu des places en 2008 ont reçu un permis pour la première fois sous le règne du Parti québécois. Il n'a pas voulu rendre la liste publique. Il a décliné une demande d'entrevue.

Le gouvernement Charest a accordé 18 000 nouvelles places aux CPE et aux garderies privées en 2008. Il a retenu 487 des 2000 projets déposés.