Les immigrants devront faire garder leurs enfants en français, sous un gouvernement du Parti québécois (PQ).

La place du français s'est détériorée à un point tel à Montréal, selon la chef du parti, Pauline Marois, qu'il faut prendre les grands moyens et donner quelques «électrochocs», y compris étendre l'application de la Loi 101 aux Centres de la petite enfance (CPE).

«Je serais favorable à ça», a-t-elle déclaré lors d'une entrevue à La Presse Canadienne en marge de la tenue, ce week-end à Montréal, d'un colloque du parti portant sur la langue, l'immigration et la question identitaire.

Mme Marois s'est montrée très préoccupée de la situation, particulièrement en ce qui a trait à l'intégration des immigrants à la majorité francophone.

«Si on ne fait rien, on approche le point de non-retour», craint la chef péquiste, accusant le gouvernement Charest de demeurer les bras croisés, pendant que la situation du français ne cesse d'empirer dans la plus grande ville du Québec.

D'où l'importance de multiplier les gestes forts, dont l'imposition du français aux enfants d'immigrants dès le berceau, et pas seulement au primaire et au secondaire comme c'est le cas depuis une trentaine d'années.

Actuellement, c'est le libre choix total qui prévaut dans les services de garde, considérés une extension du milieu familial.

Financés en grande partie par les fonds publics, les CPE n'ont aucune balise à respecter en matière de langue.

Mais désormais, «on devrait plus aller vers le fait d'appliquer la Loi 101 dans les Centres de la petite enfance», croit celle qui prône une radicalisation des positions du PQ sur la langue, s'il forme le prochain gouvernement.

L'entrevue avec la chef du PQ a eu lieu à l'occasion du premier de trois colloques thématiques (développement culturel, économique et social) organisés par le parti, en prévision du 16e congrès du parti, en 2011, au cours duquel le prochain programme électoral sera adopté.

Le premier de ces colloques invitera les membres du PQ à faire une large place au renforcement de la Loi 101, en mettant l'accent sur une francisation plus poussée des immigrants, comme en témoigne le document de réflexion produit par le parti pour alimenter les discussions des militants.

Curieusement, malgré l'intérêt de Mme Marois pour cette question, le document demeure muet quant à l'importance d'offrir un environnement francophone aux enfants d'immigrants de zéro à cinq ans qui fréquentent un service de garde.

Le programme du parti est tout aussi muet sur cette question.

Mais l'idée a fait son chemin dans le caucus des députés péquistes et fera l'objet des discussions du week-end, assure Mme Marois, qui a procédé à la création du réseau des services de garde éducatifs à contribution réduite (à 5 $ par jour) il y a une douzaine d'années.

Si Mme Marois se montre déterminée à intervenir très tôt dans la vie des tout-petits qui débarquent au Québec, avant même qu'ils fréquentent l'école primaire, elle adopte une position beaucoup plus prudente pour juger ce qu'ils doivent faire une fois qu'ils auront complété le secondaire.

Car malgré les pressions qui se multiplient, elle refuse toujours de se prononcer en faveur ou contre l'obligation pour les allophones et les francophones de fréquenter le cégep en français.

Récemment, les jeunes péquistes et l'ex-premier ministre Bernard Landry ont exhorté le parti à opter pour cette voie, mais Mme Marois veut laisser le débat se faire à la base et réserve sa décision pour plus tard.

La chef péquiste est davantage préoccupée dans l'immédiat par la langue de travail.

Elle revient donc à la charge pour rappeler l'importance de franciser les 20 000 entreprises de 50 employés et moins, où convergent de nombreux immigrants.

Comme c'était le cas dans le projet de loi péquiste 195, présenté en 2007, Mme Marois réaffirme l'importance de signer un «contrat» avec les candidats à l'immigration.

Ces derniers devraient «avoir une connaissance de base» du français avant même de poser le pied au pays, si le PQ forme le gouvernement.

Actuellement, chaque année, le Québec accueille quelque 5000 immigrants qui ne peuvent s'exprimer en français.

Une fois au Québec, ils devraient suivre des cours de français et le gouvernement s'engagerait à les aider dans leur démarche.

Quant à savoir si, à son avis, le Québec accueille déjà trop d'immigrants pour sa capacité de les intégrer à la majorité francophone, Mme Marois donne dans la nuance.

Elle dit qu'il faudra «sans doute se poser la question», si les prochaines années n'annoncent pas «une meilleure participation des nouveaux arrivants à la culture majoritaire».

Le PQ doit aussi proposer des moyens de ramener les trop nombreux francophones qui quittent l'île de Montréal pour s'installer en banlieue, a indiqué Mme Marois.