Le ministre de la Santé Yves Bolduc a hier pris ses distances face à l'engagement pris la veille par son directeur national des urgences, le Dr Pierre Savard, qui a soutenu éliminer les attentes de 48 heures et plus, d'ici un an.

«Ce n'est pas un objectif qui est atteignable actuellement», a laissé tomber hier le ministre Bolduc en point de presse. Précisant qu'il venait de s'entretenir avec M. Savard, le ministre ajoutait: «C'est clair qu'on veut améliorer nos urgences, diminuer le durée moyenne de séjour, on veut diminuer le nombre de 48 heures, mais on ne peut pas faire d'engagement sur ce que va être la situation dans une année».

Actuellement, la moyenne de durée de séjour dans les urgences est de 16,7 heures - on stagne depuis quelques années. Pour le Dr Bolduc, l'objectif est d'en arriver à une durée de séjour moyenne de 12 heures, mais il s'agit d'une moyenne, on ne peut penser que toutes les urgences y arriveront». Accusé par le PQ et l'ADQ de s'être caché derrière ses fonctionnaires, en les laissant faire seuls leur point de presse de mercredi, le ministre Bolduc a expliqué qu'il s'agissait davantage d'un «briefing technique», pour clarifier une confusion fréquente entre la «durée moyenne de séjour». Le Dr Savard avait soutenu que tous les efforts seraient consentis pour éliminer les séjours de 48 heures et plus. «On va tout faire pour y arriver. Cela va être difficile, mais on va y arriver», avait-il soutenu.

Au même point de presse, le Dr Michel Bureau, directeur des services de santé au ministère, avait indiqué que les listes d'attente en radiologie allaient être réduites, et que surtout les opérations de la cataracte sans complication disparaîtraient des hôpitaux pour se faire de plus en plus souvent en clinique privée. Depuis 2002, les chirurgies oculaires ont augmenté de 60 à 70% en clinique spécialisée, avait-il soutenu.

Encore une fois, le ministre Bolduc a contredit son fonctionnaire. «Vous avez mal compris», a-t-il répliqué aux journalistes, «l'objectif est de garder le plus de cataractes possibles à l'intérieur du réseau public». Le problème de l'attente pour cette chirurgie est en voie de disparition, selon lui, les cliniques privées sont «très performantes» et il faut prévoir une prestation privée d'une opération qui sera payée par les fonds publics.

La conférence de presse avait été convoquée après les interventions publiques des critiques à la santé du PQ et de l'ADQ, Bernard Drainville et Éric Caire.

En fin de journée, M. Drainville relevait que le ministre avait fait un geste lourd de conséquences en désavouant ainsi, publiquement, deux poids lourds de son ministère. Plus tôt, il avait accusé le ministre de se cacher derrière ses fonctionnaires, et rappelé qu'en cinq ans, le ministre Philippe Couillard avait échoué dans l'atteinte de ces mêmes objectifs.

Pour lui le gouvernement Charest, dogmatique, considère toujours le privé «comme une panacée». Or, selon le PQ, le secteur public peut sans problème «s'occuper de ça».

Pour l'ADQ, Éric Caire a aussi relevé l'absence du ministre Bolduc au point de presse de ses fonctionnaires, une «structure qui lui sert de paravent».

En dépit des engagements solennels de Philippe Couillard de régler le problème avant 2010, beaucoup trop de Québécois «croupissent sur des civières d'urgence pendant plus de 48 heures». Même l'indice préféré du ministre Bolduc n'est pas à l'avantage du gouvernement, relève-t-il. La durée moyenne de séjour était de 16h18 minutes l'an passé, elle est de 16h30 maintenant, de relever l'adéquiste.

Bataille des Plaines

Le ministre Bolduc est par ailleurs entré de plain-pied dans un débat lancé à Québec autour de la commémoration de la Bataille des plaines d'Abraham, il y aura 250 ans, en septembre prochain. La députée péquiste Agnès Maltais a publiquement dénoncé le projet de souligner l'événement, prévu par le gouvernement fédéral. La ministre conservatrice Josée Verner a répliqué qu'elle comptait bien participer aux cérémonies.

Hier, Yves Bolduc, soulignait qu'il «ne serait certainement pas présent». «Je ne pense pas qu'il y ait lieu de commémorer l'événement en tant que tel. Au Lac-Saint-Jean je n'ai jamais entendu parler qu'on commémorait ce type d'événements», a soutenu le médecin originaire du Saguenay.

Pour Bernard Drainville, la cause est entendue. «Je suis très mal à l'aise de commémorer la défaite de notre peuple. Le 13 septembre 1759, c'est la conquête de la Nouvelle-France, c'est la défaite. Personne ne me fera croire qu'on devrait célébrer notre défaite, la conquête par les armées britanniques», a soutenu le péquiste.

Pour Éric Caire, l'adéquiste, «c'est des enfantillages», cet événement fait partie de notre histoire collective et a contribué à faire du Québec ce qu'il est devenu. «Je m'excuse, mais cela a existé, la Bataille des plaines. Wolfe a gagné, Montcalm a perdu. On est devenu une colonie britannique, c'est notre histoire, que cela plaise ou non», a-t-il précisé. En se lançant dans de tels débats futiles, les politiciens n'améliorent pas leur cote auprès de la population, déplore M. Caire.