Chaque semaine, Nathalie Collard rencontre une personnalité qui s'est retrouvée au coeur de l'actualité et lui pose 10 questions. La 11e question provient du public. Cette semaine, notre journaliste s'est entretenue avec Christian Paradis, ministre fédéral de l'Industrie et député de Mégantic-L'Érable.

1 Votre gouvernement semble vouloir se rapprocher du Québec. Avez-vous l'impression d'avoir une pente à remonter auprès des Québécois?

C'est certain qu'il y a de l'ouvrage à faire. Notre gouvernement a réglé des dossiers historiques avec le Québec depuis 2006, mais on doit se rapprocher. Et ça va au-delà des cinq ministres élus au Québec. Tout le monde doit y mettre du sien, les ministres, les sénateurs, tout le monde.

2 Stephen Harper a rencontré Brian Mulroney récemment. Quels conseils lui a-t-il demandés?

Je n'étais pas là, je ne sais pas de quoi ils ont parlé, mais j'ai trouvé que c'était une excellente nouvelle que le premier ministre Harper rencontre un de ses prédécesseurs, un homme qui a une vaste expérience des relations provinciales-fédérales. J'étais estomaqué de voir que certains percevaient cette rencontre de façon négative.

3 Craignez-vous l'élection du Parti québécois au prochain scrutin québécois?

On demeure très prudents. Pour le moment, il n'y a pas d'élections, même s'il y a plusieurs signes. On ne veut pas s'ingérer dans une campagne provinciale et on va respecter le choix démocratique des Québécois, quel qu'il soit. Néanmoins, on va toujours prôner un Québec fort dans un Canada uni. On croit à l'épanouissement et à la prospérité du Québec dans une fédération forte.

4 Vous avez déposé une motion pour défendre le droit du Québec d'adopter la loi spéciale (78). Qu'avez-vous pensé de la crise sociale qui a déchiré la province au cours des derniers mois?

J'ai trouvé cela spécial quand l'ONU a fait un commentaire disant que la situation au Québec était alarmante. Quand on sait ce qui se passe ailleurs dans le monde, en Syrie par exemple, j'étais surpris que l'ONU s'intéresse au Québec. En ce qui concerne la motion, je trouvais important, comme gouvernement fédéral, de réitérer la primauté du droit des provinces à voter leurs propres lois et, pour tout vous dire, j'ai été assez estomaqué que l'opposition n'appuie pas ma motion. Quant à la crise au Québec, j'ai été moi-même pris dans une manifestation à Montréal. Quand elles se font de façon légale et pacifique, je n'ai aucun problème avec ça. Mais je suis contre l'intimidation et la violence.

5 Plusieurs lois et règlements adoptés au cours des derniers mois qu'on pense au registre des armes à feu, au rapprochement avec la couronne britannique, à votre position en matière d'environnement donnent l'impression que votre parti est plus proche des valeurs du Reform Party et qu'il est dirigé par des gens de l'Ouest. Qu'en dites-vous?

Je ne suis pas d'accord et ce genre d'observation me fait dire qu'il faut mieux faire sortir notre message au Québec. On a réglé des dossiers historiques avec le Québec les transferts en santé, le siège du Québec au sein de l'UNESCO, les transferts fiscaux. Quand on a adopté la loi sur les contrevenants, on a véhiculé le mythe qu'on voulait mettre des jeunes qui avaient volé un paquet de gomme en prison, alors qu'on voulait resserrer la loi pour les criminels violents. C'est vrai que bien des Québécois ne sont pas d'accord avec l'abolition du registre des armes à feu, mais ils sont d'accord avec notre approche pour les armes d'épaule. Et plusieurs Québécois approuvent notre réforme de l'immigration, qui favorise l'intégration économique des immigrants car le Québec connaît des pénuries dans plusieurs secteurs d'emploi. Bref, il y a beaucoup de valeurs québécoises dans nos décisions.

6 Le premier ministre Harper a toujours fait un effort pour parler francais. Or, au cours des derniers mois, votre gouvernement a nommé plusieurs anglophones unilingues à des postes névralgiques comme celui du vérificateur général. Comment expliquer cela?

Le premier ministre croit au principe des deux peuples fondateurs et je suis toujours épaté par la qualité de son français. En ce qui concerne le vérificateur général, il s'est engagé à parler français et je m'attends à ce qu'il le fasse. Nous avons adopté la feuille de route pour la dualité linguistique canadienne 2008-2013 et, depuis, il y a eu beaucoup d'efforts faits dans la fonction publique. Est-ce que c'est perfectible? Oui.

7 La commissaire à l'éthique enquête sur un voyage de chasse que vous avez fait avec l'homme d'affaires Marcel Aubut. Vous avez affirmé que vous aviez payé votre part, mais certains se disent sceptiques. Les politiciens devraient-ils éviter ce genre d'activité pour ne pas éveiller les soupçons?

Le piège que je veux éviter, c'est de faire des commentaires dans les médias. Il y a eu beaucoup de caricatures à mon sujet ainsi que des fausses photos de moi dans un palace qui ont circulé sur Twitter. On a également voulu faire un lien entre ce voyage et le dossier de l'amphithéâtre de Québec, alors que ce dossier n'existait même pas au moment du voyage. Or je répète que mon comportement a été conforme à la loi. Si la commissaire veut entendre ma version des faits, cela me fera plaisir de la lui présenter et de faire valoir mes arguments, car je crois en cette institution.

8 Plusieurs mesures comprises dans la loi C-38 sont perçues comme un affaiblissement ou un recul des contrôles environnementaux lorsqu'on met en oeuvre de grands projets. Que répondez-vous à cela?

Je ne suis pas d'accord avec cette interprétation. Quand j'étais ministre des Ressources naturelles, j'ai été en mesure d'apprécier l'énergie déployée de façon disparate quand on évalue des projets. On applique une approche systématique alors qu'on devrait évaluer chaque cas. Nous voulons mettre l'accent sur les grands projets et, dans ce contexte, nous croyons qu'il est préférable de mener des consultations en amont car les groupes autochtones, par exemple, nous ont dit être frustrés qu'on les rencontre une fois les décisions prises. On veut aussi s'arrimer avec les provinces qui ont leur propre processus d'évaluation en mettant en place des principes d'équivalence et de substitution pour ne pas dédoubler les mesures.

9 On parle de changer le nom du pont Champlain pour celui de pont Maurice-Richard. Certains estiment qu'il ne faut pas faire disparaître le nom du fondateur de la Nouvelle-France. Dans quel camp vous situez-vous?

Vous me prenez de court. Je n'ai pas mûri cette réflexion. Je me retrouve plutôt dans le camp de ceux qui veulent remplacer le pont, c'est ça, la priorité. Après, il y aura des consultations pour le nommer.

10 C'est la fête du Canada ce week-end. Quelle signification donnez-vous à cette journée?

C'est important, les gens sont fiers de la façon dont on se positionne dans le monde, par rapport à la crise financière par exemple, car nous sommes le pays du G8 qui a la meilleure performance. C'est aussi important de prendre le temps d'apprécier le fait que nous vivons dans un État de droit stable, démocratique, libre, avec une stabilité économique.

TWITTER +1 de Dany Turcotte @danyturcotte

Vous sentez-vous seul au Québec?

Quand je me promène au Québec, je ne me sens pas seul, je me sens entouré. En ce qui concerne les médias, par exemple, il y a un rapprochement à faire.