Dans la foulée du jugement de la Cour suprême sur Omar Khadr, le Parti libéral estime qu'il faut encadrer les services consulaires canadiens pour que le gouvernement ne puisse choisir à qui il vient en aide lorsque ses ressortissants sont pris à l'étranger.

«Ce gouvernement choisit qui, selon lui, mérite la protection du gouvernement et qui ne la mérite pas. C'est inadmissible, a souligné hier le chef libéral, Michael Ignatieff, à l'issue d'une table ronde sur le sujet. La citoyenneté canadienne est indivisible. Les Canadiens ne veulent pas aller à l'étranger et avoir à se demander si le gouvernement canadien les protégera plus ou moins selon la couleur de leur peau, leur nom ou l'endroit où ils sont nés.»

 

Les libéraux étudient la possibilité de présenter un projet de loi pour encadrer les devoirs et responsabilités du gouvernement face à ses ressortissants à l'étranger.

«Les Canadiens qui ont des problèmes à l'étranger ne devraient pas avoir à attendre les décisions des tribunaux avant de recevoir de l'aide de leur ambassade», a estimé Dan McTeague, critique libéral en matière d'affaires consulaires.

Le 29 janvier dernier, la Cour suprême du Canada a rendu un important jugement dans le dossier d'Omar Khadr, ce jeune Canadien détenu à Guantánamo. Le plus haut tribunal du pays a jugé qu'Ottawa avait violé les droits fondamentaux du jeune homme et que ce dernier méritait réparation. Le gouvernement conservateur refuse depuis des années de le rapatrier.

«C'est vraiment inutile de vous dire que le Canada a un problème avec la façon dont il traite ses ressortissants à l'étranger. Je pense qu'on le sait tous, maintenant, a souligné le professeur de droit de l'Université d'Ottawa Amir Attaran, qui participait à la table ronde. La réputation du Canada comme défenseur des droits de l'homme commence à s'effriter dans le monde.»

Selon lui, il est impératif de légiférer pour imposer la transparence au gouvernement lorsque des Canadiens ont des problèmes à l'étranger, pour exiger l'équité en lui interdisant de choisir à qui il vient en aide et pour donner aux tribunaux le pouvoir de sévir lorsque le gouvernement manque à ses responsabilités face à ses propres citoyens.

Pour Julian Falconer, l'avocat de Maher Arar dans sa poursuite contre le gouvernement canadien, l'absence de règles et l'entêtement actuel du gouvernement risquent de coûter très cher aux contribuables en frais de dédommagement aux victimes. Expulsé en Syrie par les États-Unis sur la base de renseignements erronés fournis par les autorités canadiennes, emprisonné et torturé, M. Arar a finalement obtenu, après trois ans de recours juridiques, une compensation de 10,5 millions de dollars.

Me Falconer défend maintenant Suaad Hagi Mohamud, qui poursuit le gouvernement pour 2,5 millions de dollars. La Canadienne d'origine somalienne a été retenue neuf semaines au Kenya, en 2009, parce que les autorités canadiennes la considéraient à tort comme une usurpatrice d'identité. Depuis son retour, au mois d'août dernier, elle n'a reçu aucune excuse du gouvernement pour cette erreur.

Pris dans une situation similaire, le Montréalais d'origine soudanaise Abousfian Abdelrazik a intenté lui aussi l'année dernière une poursuite de 24 millions contre le gouvernement fédéral et de 3 millions contre le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, qu'il accuse d'avoir violé ses droits fondamentaux. M. Abdelrazik est resté injustement six ans au Soudan, et c'est finalement une décision de la Cour fédérale qui a contraint le gouvernement conservateur à le rapatrier.