Stephen Harper semble avoir mal digéré les critiques formulées publiquement par le premier ministre du Québec Jean Charest à l'égard de son gouvernement au sommet sur les changements climatiques de Copenhague, au Danemark.

En entrevue de fin d'année aux réseaux de télévision CTV et TVA, le chef conservateur a soutenu que les Canadiens espéraient que les débats provinciaux soient mis de côté sur la scène internationale.

«Je pense que les Canadiens s'attendent - lorsque le Canada entre dans le domaine international, dans les négociations internationales - que les débats provinciaux, les débats partisans et les agendas personnels restent derrière», a affirmé M. Harper.

Selon lui, il est «malheureux» que de tels incidents soient survenus. Il a insisté sur le fait que ce sont les pays souverains qui peuvent arriver à un accord international, en sous-entendant que ce n'était pas du ressort des provinces.

«On peut avoir seulement une voix à la table des négociations et c'est seulement les pays souverains qui peuvent arriver à un consensus», a-t-il noté au réseau francophone.

L'environnement est cependant de compétence partagée entre le fédéral et les provinces, ce que Jean Charest n'avait d'ailleurs pas manqué de souligner lors de son voyage à Copenhague. Le premier ministre du Québec avait alors tenu à rappeler que les gouvernements provinciaux n'ont pas de titre «junior» et qu'il incombait au fédéral de s'assurer de tenir compte de leur opinion.

En entrevue, M. Harper a admis que l'environnement était bien de compétence mixte et qu'il n'était pas interdit pour le Québec d'avoir des cibles plus contraignantes que celles d'Ottawa.

«Si le gouvernement du Québec veut avoir des cibles plus contraignantes pour le Québec, ce n'est pas défendu, il peut le faire», a spécifié le chef conservateur.

«C'est (son) droit, mais à la fin, le Canada doit participer à un accord international, et je pense que les provinces ne vont pas bloquer nos obligations internationales», a-t-il conclu.

Jean Charest n'avait pas été tendre avec son homologue fédéral à Copenhague, jugeant les cibles proposées par Ottawa trop timides et se désolant que le Canada soit à la remorque des Américains dans la lutte contre le réchauffement planétaire. Il avait aussi souligné à gros traits les obligations constitutionnelles d'Ottawa par rapport au Québec.

«A Copenhague, le gouvernement fédéral a le pouvoir de signer des traités, mais il n'a pas le pouvoir d'engager nos gouvernements provinciaux dans nos domaines de compétences. Ca, c'est la réalité canadienne, et c'est la dure réalité», avait-il fait remarquer.

Dans des extraits d'une entrevue accordée à TVA, diffusés mardi, M. Charest a défendu son approche à Copenhague.

Le premier ministre du Québec a soutenu que si Stephen Harper et les représentants du gouvernement fédéral à Copenhague sortaient amers de la conférence, ils n'avaient qu'à s'en prendre à eux-mêmes.

M. Charest a dit avoir simplement «défendu les intérêts du Québec». «Pourquoi je dirais quelque chose au Québec et le contraire à Copenhague?», a-t-il fait valoir.

Le premier ministre du Québec a dit n'avoir jamais vu un gouvernement canadien se coller autant à Washington. M. Charest a aussi déploré l'hostilité affichée par le gouvernement de Stephen Harper envers les environnementalistes, rappelant l'épisode d'un canular rapidement attribué à tort au co-président de Réseau action climat international, le Québécois Steven Guilbeault.

Prorogation?

Lors de son entretien avec la chaîne anglophone CTV, Stephen Harper a par ailleurs laissé planer le doute quant à la stratégie que son gouvernement allait adopter au retour du congé des Fêtes.

Des rumeurs persistantes sur la colline ont laissé entendre ces derniers jours que le chef conservateur tergiversait avec l'idée de demander la prorogation de la session parlementaire, notamment pour éviter les comités sur le sort des détenus afghans, au cours desquels les conservateurs se sont retrouvés dans l'eau bouillante cet automne.

Selon ce scénario, les travaux parlementaires ne reprendraient qu'après les Jeux olympiques de Vancouver. M. Harper, qui assure ne pas encore avoir pris de décision sur ce plan, n'a toutefois pas exclu une telle hypothèse.

«Nous allons mettre de l'avant un nouveau budget en mars et nous travaillons actuellement sur la planification de la nouvelle session du printemps. Mais nous n'avons pas pris de décisions sur un bon nombre de choses: le moment du discours du Trône, le remplacement de sénateurs, et toute ces choses que je lis dans les journaux que j'aurais supposément décidé», a-t-il lancé.